René Bouvard, chef pilote de l’aéro-club de La Tour du Pin

Alain Blondel

(Témoin, à l’âge de 9 ans, de la chute du « Piper » raconte ……)

René Bouvard est né à Ruy (actuellement Ruy-Montceau près de Bourgoin-Jallieu – Isère), le 20 décembre 1928. Ses parents vivaient dans cette commune. Son père était mouleur chez SAURER DIEDERICHS, fabrique de métiers à tisser. Sa mère était tisseuse aux Etablissements SCHWARZENBACH. Deux entreprises de renommée régionale aujourd’hui disparues.

René et son frère Marcel ont, tous deux, été attirés très jeunes par l’aviation légère.

C’est ainsi que René a fréquenté l’aérodrome de Cessieu dès 1946.

Avec l’aide financière d’une bourse de l’Etat, il a été formé par René Marty, moniteur. Après sa licence de pilote de planeur, le brevet d’aptitude de pilote d’avions de tourisme lui a été délivré le 10 juin 1948.
Le 18 décembre 1948, il est parti au service militaire pour être affecté pendant un an, en tant que non-navigant, au Maroc, sur la Base Aérienne 707 de MARRAKECH.

A son retour en France, il effectue en 1950 son stage d’instructeur au Centre de vol à voile de la Montagne Noire (près de Mazamet). Enfin, il rejoint l’Aéro-club dont il devient moniteur où il se consacre pleinement à sa section Vol à Moteur et à sa section Vol à Voile.
De son mariage en 1951 avec Paule, est née Myriam le 27 août 1952.

Chef-pilote de l’aéro-club, il était alors rémunéré par l’Etat (plus précisément S.A.L.S. Service Aviation Légère et Sportive – devenu plus tard le S.F.A.C.T. aujourd’hui dénommé E.N.A.C.)
Sa petite famille était logée à La Tour du Pin dans une maison des « Cités Clerget » du nom de Louis Clerget, industriel de la chaussure et Président de l’Aéro-Club.
René se dévouait corps et âme à son métier ; on le surnommait avec respect et affection « le Grand ».

L’aéro-club était doté vers 1955 d’un important parc composé de 6 avions (Piper Club – NC 853 – Auster – Tiger Moth remorqueur) et 10 planeurs (C 800 – C 25 S – C 301- Nord 1300 – SA 103 – AV 36 – Nord 2000) sans oublier un treuil V8 Ford.
Au printemps 1958, il accueillait avec les dirigeants du Club, Auguste Morel, Dauphinois d’origine. Ce dernier n’était autre que le pilote d’essai à la SNECMA de « l’Atar Volant » puis du ‘’Coléoptère », machines révolutionnaires à réaction et décollage/atterrissage vertical.
A l’occasion de fêtes aériennes, René Bouvard a effectué des présentations de voltige sur planeurs Nord 2000 ou Fauvel AV 36 comme ce fût le cas lors de son dernier meeting du dimanche 20 juillet 1958.

René Bouvard montant à bord d’un Stampe (Coll Alain Blondel)

Agé de 29 ans, René venait de passer le cap des 4.000 heures de vol (dont 2.034 sur planeurs) lorsque survint le drame.
Le mercredi 23 juillet 1958 à 16 heures 40, le Piper Cub immatriculé F-BTDY a bord duquel il avait pris place avec un élève, le Sous-Lieutenant Georges Peschaud, s’est écrasé à une centaine de mètres de l’aérodrome. L’appareil évoluait à une hauteur de 150 mètres et sa chute a été provoquée par la rupture de la chape du hauban d’une aile qui s’est alors repliée… Les deux occupants sont morts sur le coup.

Cet évènement tragique a profondément marqué la vie de l’Aéro-Club. Ce dernier a d’ailleurs été confronté à un recours en Justice de la part de l’épouse de l’élève (en instance de divorce). Après un jugement en première instance, l’aéro-club a tenté, en appel, de mettre en cause le bureau de sécurité Véritas qui était intervenu peu de temps avant l’accident lors d’une révision de l’appareil… mais en vain. La plaignante obtint des dommages-intérêts.

Le Journal « Le Progrès » révèle qu’un émouvant hommage a été rendu le 28 juin 1959 à René Bouvard lors d’un meeting aérien auquel assistait un public de près de 3000 personnes. Le produit de cette fête étant au profit de Myriam, sa fille alors âgée de 7 ans. De nombreuses présentations ont ravi les spectateurs : démonstration par Henri Giraud, pilote des glaciers sur son Piper Choucas ; voltige sur Stampe par M. Lizere, sur Focke Wulf par M. Baulon, sur planeur Nord 2000 par M. Bornand ; démonstration sur hélicoptère Alouette 2. De nombreux sauts furent exécutés par les parachutistes venus de Turin et de Grenoble (dont une chute libre de 4000 mètres).

Puis, l’activité aérienne a repris au sein de l’Aéro-Club durant les années 1959/60 avec l’arrivée du nouveau moniteur Bruno Debiesse et plus tard en 1963 avec le recrutement de Michel Bourge.

Près du Club House, une stèle et le hangar des « Ailes Dauphinoises’’ inauguré à son nom perpétuent le souvenir de René Bouvard.