Echo du 06.06.1930 : Avion allemand sur Bailleul puis Lille.
A la question « qui peut m’en dire un peu plus sur cet avion ? », vous avez été nombreux à me donner d’excellentes pistes. Pour Bailleul, c’était un terrain vague mais, à Ronchin, la piste était balisée.
En fait, avec toutes les réponses apportées, je peux vous dire que cet avion a fait couler de l’encre.
Note de Georges : « Sur incident mécanique déjà à l’époque comme maintenant, les atterrissages en campagne n’étaient pas autorisés; ceci dit, il vaut mieux faire un atterrissage fortuit mais voulu dans un champ plutôt qu’un crash en essayant de rejoindre l’aérodrome. »
En premier lieu, voici quelques données trouvées sur le site :
Plan Darmstadt D-18.
Avion Darmstadt D-18 (1)
Conception : F. Fecher
Construction : 1929
Matériaux : Bois, contreplaqué, tissu
Envergure : 7,2 m
Surface alaire : 12,1 m2
Masse à vide : 320 kg
Nombre de sièges : 2
Palmarès : Trois records du monde
Une belle photo du D-18 en vol.
Le site Wikipédia (2) résume bien la genèse de cet avion qui était un D-16 au moment du projet en 1927 et qui sera construit sous la dénomination D-18 par suite d’un changement de moteur.
Christian et Pierre d’expliquer aussi : « Ceci dit, des atterrissages en campagne sur pannes diverses – ou pour cause météo – étaient innombrables à l’époque. »
En revanche, Christian me fait parvenir le PDF Wikipédia du D-18. On y explique que l’Akaflieg est la contraction de « Akademische Fliegergruppe an der Technischen Hochschule Darmstadt » (Section aéronautique de l’Académie de Darmstadt), Akaflieg Darmstadt en abrégé, et qu’elle a été fondée en 1920. »
Cette fois, la photo de présentation nous montre le D-18 transformé en conduite intérieure.
Mais Christian a aussi découvert que l’Aéronautique d’avril 1930 nous montrait aussi cet avion lors d’un passage sur l’aérodrome d’Orly. Vous pouvez trouver l’article complet sur le site de la BNF (3).
L’Aéronautique n°131 p143 (avril 1930).
⇒ Xavier : « Quant à l’avion, c’est facile puisqu’il s’agit du célèbre Darmstadt D-18, vainqueur du Challenge International de Tourisme (organisé par l’Aéro-Club de France) de 1929, enfin de son épreuve technique.
L’atterrissage à priori, d’après l’article, était voulu afin de récupérer la casserole d’hélice (à la mode de l’époque façon Ryan NYP*, profil très aérodynamique mais cylindres sans capot NACA*) qui s’était fait la malle (si j’ose dire) dans un champ.
Jusqu’en 1920, les statistiques nous indiquent qu’un vol sur trois environ devait s’interrompre suite à des soucis techniques. Je ne connais pas les statistiques pour 1930 (en forte diminution ?) ».
⇒ Philippe J. : « Radié en 08.1930 » Pourquoi ? À lire dans la suite de cet article.
⇒ Gérard et Olivier : « J’ai simplement été voir sur le Net côté allemand : il s’agit donc du AKAFLIEG DARMSTADT D-18 fabriqué en 1929 par la section aéro de l’académie de DARMSTADT ; plusieurs autres planeurs et avions furent développés par cette section aéronautique. (4)
⇒ Piet : « Akaflieg Darmstadt D-18 “Schwaben”. Date d’enregistrement allemande : 1929. Le propriétaire est Akaflieg Darmstadt. Un seul exemplaire est construit de ce type…». (5)
« D-1561 : Akaflieg Darmstadt D-18 – Nom de l’appareil : Schwaben – Werknr : 18 – Moteur : 1x Armstrong-Siddeley Genet – Date d’immatriculation : 1929 – Propriétaire : Akaflieg Darmstadt.
26 juillet 1930 : Amerrissage d’urgence en Méditerranée entre Barcelone et Nîmes. Les occupants ont été secourus par un navire passant qui a également ramené l’épave.
En 1930, les cockpits ont été couverts (voir photo 372a ci-dessous). Un seul exemplaire a été construit. »
Foto 372 D-1561. Akaflieg Darmstadt D-18, kopie 1100.
Foto 372a D-1561.Darmstadt D-18 gesloten cockpits.
Photos 372 et 372a (Origine : Nederlandse Luchtvaart.nl).
Vous noterez :
1- que, sur la photo 372, l’immatriculation n’est pas inscrite en grand sur le fuselage,
2- que, sur la photo 372a, le numéro D4 signifie que cette photo a été prise durant une compétition différente de celle prise à Orly, numéro que l’on voit sur la photo parue dans l’Aéronautique d’avril 1930.
Henri demande à son épouse qui transmet la demande à Pierre Gaillard. Ce dernier nous renseigne sur la fin de vie (très courte) de cet avion particulier :
« Vous avez là un appareil unique : le biplace Darmstadt D.18 immatriculé D-1561 qui, sorti en janvier 1929 avec des cockpits ouverts comme sur la photo de presse de juin 1930 et la première photo ci-dessous, a été modifié avec des cockpits fermés pour participer, porteur du numéro de course D4, à l’Europa Rundflug – pour les Français le Challenge International du Tourisme – en juillet / août 1930 (deuxième photo ci-dessous). Au cours des épreuves, son pilote, Rudolf Neininger, victime d’ennuis de moteur, a dû se poser en Méditerranée, entre Barcelone et Nîmes, le 26 juillet (voir carte suivante). Le pilote et son passager ont été sauvés par un bateau, lequel a également récupéré l’épave de l’appareil qui a été radié en août suivant.
Une amusante anecdote : lors du passage de ce Challenge à Orly, Roland Payen (alors âgé de 16 ans, il habitait Athis-Mons) a été particulièrement intéressé par ce D.18 ; il en avait même fabriqué une maquette (il me l’a raconté bien plus tard). Le Darmstadt D.18 était caractérisé par ses ailes fortement décalées. »
Pierre nous apporte aussi une très belle photo qui ne nous avait pas encore été communiquée.
Tracé du circuit « Europa Rundflug ».
Gérard de préciser : « Dans le lien envoyé, il faut ouvrir toutes les fenêtres et on tombe sur les photos de tous les planeurs et avions développés par l’académie de DARMSTADT ; sinon tu interroges simplement sur le Net ⇒ AKAFLIEG DARMSTADT D 18 comme ci-dessous :
https://www.wikiwand.com/en/Darmstadt_D-18.
Effectivement, on découvre une belle image légendée : « Rudolf Neininger (à gauche) avec son équipier devant le D-18 lors du Challenge 1930 ».
Origine : Bundesarchiv Bild 102-10158, Piloten des internationalen Europa-Rundflugs.
Nous en arrivons à une recherche effectuée par Jérôme à partir d’un grand nombre de sites recensant le passage de cet avion. (6)
Magnifique photo de ce prototype devant un aérogare de la Deutsche LuftHansa.
Mais où ? On peut penser que c’est Berlin-Tempelhof.
| Copyright : | ETH-Bibliothek Zürich, Bildarchiv / Fotograf: Unbekannt / Ans_05338-02-274-AL-FL / Marque du domaine public |
Sur le site anglais ci-dessous, on trouve des milliers d’immatriculations allemandes de l’entre-deux guerres (http://www.airhistory.org.uk/gy/reg_D-5.html page 6).
Immatriculations D-18.
Le site suivant explique ce qu’a été cette compétition internationale européenne : https://de.wikipedia.org/wiki/Europarundflug_1929.
Quant à celui-ci, il traite de l’Akaflieg : https://de.wikipedia.org/wiki/Akaflieg_Darmstadt_D_18.
Il me reste à vous donner lecture des notes de Hans-Martin :
« C’est avec une certaine fascination que j’ai lu l’article sur l’avion allemand qui a atterri par incident en 1930 près de Bailleul – c’est aussi un sujet d’intérêt local pour moi car j’habite près de Darmstadt, d’où provenait l’avion, depuis plus de vingt ans quand j’ai commencé mes études là-bas.
Aujourd’hui on ne peut plus s’imaginer qu’à l’époque Darmstadt était un des centres d’activités et de recherche aéronautique en Allemagne grâce à son université technique où on se lançait sur le sujet déjà bien avant 1914, d’où déjà les origines d’Akaflieg. La ville possédait deux aérodromes, un aérodrome militaire et un aéroport civil lié au réseau national de la Lufthansa. L’Institut de Recherche du Vol à Voile, la DFS, a établi ses ateliers sur l’aérodrome militaire de Griesheim quasiment sur le territoire de Darmstadt. Cet aérodrome, sous contrôle français jusqu’en 1930 et après une période américaine, est toujours opérationnel pour l’université de Darmstadt, la TUD, et moi pendant mes études j’ai fait des mesures pour l’institut de technologie automobile en roulant sur ses pistes en voiture pour tester les vibrations causées par des freins.
Il ne doit rien au hasard que le pilote du D-1561 était étudiant.
Il a sûrement décollé de l’aérodrome de la Lichtwiese (litt. : Pelouse de la clairière) qui servait de base pour l’Akaflieg. Aujourd’hui le terrain de la Lichtwiese est occupé par la TUD même et aucune trace ne reste de son passé aéronautique. »
Localisation des aérodromes de Darmstadt, d’après Hans-Martin.
Google Map : Griesheim.
En complément de l’article sur l’atterrissage à Bailleul et à Lille-Ronchin d’un avion allemand en 1930
Pour faire suite à la recherche précédente sur l’atterrissage du Darmstadt D-18 à Ronchin et sur une interrogation de Jean-Pierre qui me demandait un complément d’information sur « Marin-la-Meslée », j’ai pensé faire un petit topo sur ce nom qui parle à beaucoup de monde ainsi que sur le second personnage nommé « Césure » qui mérite aussi d’être évoqué car il a été un personnage clef de la création de Lille-Ronchin.
§ Marin-la-Meslée
En fait, il s’agit du père de notre héros national Edmond Marin-la-Meslée.
Athelstan Marin-la-Meslée est né en 1880 à Sydney (Nouvelle-Galles du Sud). Il était géographe, armurier et ingénieur ICAM à Valenciennes dans le Nord. Durant les années d’avant la Première Guerre mondiale, il sera cofondateur du club d’aérostation et d’aviation de Valenciennes. Edmond, Edouard, Raymond est né en 1912 : il est le 5ème enfant de cette famille de 10 enfants.
C’est vers 1925-1927 que la famille se déplace à Lille. Athelstan, toujours passionné par l’aéronautique, devient membre de l’AANF (Association Aéronautique du Nord de la France) et deviendra quelques années plus tard le secrétaire général de l’Aéro-Club de Lille.
Afin d’illustrer son passage au sein de la section « Vol moteur » et des nouvelles activités d’après 1936 vous verrez ci-dessous la photo de la remise des diplômes aux jeunes de la section d’Aviation Populaire de Lille sur le terrain de Lille-Ronchin. Vous trouverez donc, entouré en rouge Athelstan et en jaune le plus jeune frère d’Edmond, Christian Marin-la-Meslée. Cette remise de diplômes se fait en la présence du Préfet Carles, du chef pilote de l’A-C Lille, René Chailloux et de bon nombre de personnalités régionales.
Photo de la collection de Gérard Vanlaer (4ème en partant de la gauche et debout) qui était à ce moment-là président de l’Aéro-Club de Lille.
Il serait bien long d’expliquer toute la vie et les actions d’Athelstan pour la promotion de l’aéronautique dans la région Nord. De plus concernant notre héros, Edmond, je dispose de bon nombre de documents inédits car j’ai rencontré la sœur d’Edmond qui m’a prêté des photos, articles et souvenirs. Je n’ai pas résisté à finir cette petite histoire sur des documents amusants datant de 1929. Il s’agit des portraits silhouettes d’Athelstan et d’Edmond Marin-la-Meslée.
Famille Marin-La-Meslée.
§ Césure
L’article l’annonce : « il est vice-président de l’AANF ».
S’il est un grand personnage, parmi quelques autres, de l’aérodrome de Lille-Ronchin, c’est bien Jules Césure. En effet, depuis que Fernand Scrive a utilisé ce terrain pour faire décoller ses planeurs dans les années 1910, il a toujours été secondé, sous le volet plus général aéronautique, par ce phénomène qu’est Césure.
Notre homme, qui dans les années 1890 était professeur d’escrime, faisait déjà parler de lui dans le Boulonnais. Je ne peux que vous citer les quelques phrases d’un journaliste de 1928 qui résume le début de vie de Jules : « Nous avons récemment raconté, comment un Lillois, M. Césure, avait essayé, voici plus de trente ans, de traverser la Manche sur un hydro-tricycle de son invention. Les actions d’audace abondent dans la vie de notre concitoyen et, parmi tous les tours de casse-cou que notre ami peut mettre à son actif, le moindre n’est certainement pas la leçon d’escrime que, maître d’armes à Boulogne, il donna à son élève M. Bocquillon, dans la cage aux lions du réputé dompteur de l’époque, le grand Bidel ».
Jules Césure devient Lillois et prétend être le premier importateur d’automobiles de France. Son garage est installé en plein centre de Lille : il est le représentant de la S.A. « Bolide ».
Dès 1912, celui-ci construit le premier hangar de Lille-Ronchin pour y mettre un avion qu’il venait d’acheter et qui devait servir à son fils.
Depuis cette date, il n’aura de cesse de faire la promotion de l’aéronautique à Lille mais aussi dans la région du Nord. Sa présence sur le terrain de Lille-Ronchin était permanente. Il y a accueilli des quantités d’avions venant de toute l’Europe. Il va décéder en octobre 1931 et laissera une place bien vide et des souvenirs impérissables aux membres de l’AANF.
Jules Césure à gauche et Athelstan Marin-la-Meslée à droite, les piliers de l’Aérodrome de Ronchin.
Il aurait fallu beaucoup de pages de textes pour faire honneur à ces deux Messieurs.
Georges, Louis, Daniel L., Richard, Roger, Pierre, Christian, Laurent, Jean-Louis, Philippe M., Xavier, Philippe J., Jean-Michel, Gérard F., Henri, Laurent n°2, Olivier, Jean-Pierre, Piet, Jean-Valery, Daniel F., Patrick, Jean V., Henri G., Ariane Gillotte et Pierre Gaillard, Alain, Eric, Jérôme, Hans-Martin.
Merci à tous.
♦ Jean-Luc Charles – membre 2A ♦
(1) https://www.akaflieg.tu-darmstadt.de/d-18/
(2) https://fr.wikipedia.org/wiki/Darmstadt_D-18
(3) https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k97669160/f161.item
(4) https://www.akaflieg.tu-darmstadt.de (Rubrique : À propos de nous – « Prototypes, D-18 »)
(6) https://www.e-pics.ethz.ch/index/ETHBIB.Bildarchiv/ETHBIB.Bildarchiv_91187.html
* Ryan NYP : NYP → New York Paris ; autrement dit, le Spirit of St.Louis.
* NACA : National Advisory Committee for Aeronautics (en français, Comité consultatif national pour l’aéronautique).
