ALG A-23C, Querqueville

Localisation du terrain (François Robinard)

Précisions succinctes apportées par François Robinard, extrait de son livre « 50 aérodromes pour une victoire » – page 243 – (voir ci dessous) avec son aimable autorisation.

ALG « Advanced Landing Ground », pouvant être traduit en français par « Aérodromes de l’avant » dont l’aménagement, au plus prés de la ligne de front, pouvait apporter rapidement un soutien aux troupes engagées.
ALG B : Terrains Anglais – ALG A : Terrains Américains

Codification A-23C (C = cargo / transport), nom de code A-23C T3

Construction par le 850th EAB

Date de début de la construction : 30 juin 1944

Date de mise en service opérationnelle : 6 juillet 1944

Fin d’activité opérationnelle : 5 août 1945

Unités présentes sur le terrain :

  • 31st Transport Group.  Le 31st Transport Group comprenait 3 Squadron de transport (87th, 313th et 314th Transport Squadron) et 2 Squadron de convoyage (310th et 325th Ferrying Squadron). Présent sur A-40 Chartres avant sa dissolution suite à réorganisation.

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Historique

Le champ d’aviation de Querqueville accueille en juillet 1911 un meeting aérien qui attire une foule considérable
En 1925 il sert à l’entraînement des forces aéronavales. Son hangar est construit par les Etablissements R. Sottile. Il s’agit d’un aérodrome militaire, doublé d’une base d’hydravions, la baie de Ste Anne qu’il borde, servant aux amerrissages.
En 1939, il prend pour dénomination Base d’aéronautique navale de Querqueville. Les 5 et 6 août, une « fête des ailes » y est organisée, qui attire une foule importante. L’Amiot 350, « premier appareil » construit à Cherbourg par les usines crées par Félix Amiot y est présenté.
L’aérodrome accueille à l’occasion des vols civils.
Au début de la Seconde Guerre Mondiale, il regroupe deux escadrilles de chasse et deux escadrilles de bombardement.
Dès juin 1940, il est occupé par des unités de chasse et de reconnaissance de Luftwaffe qui l’appelaient Cherbourg-West, durant la Bataille d’Angleterre. Le terrain était alors un champ d’aviation engazonné avec un système de drainage artificiel sans piste de décollage en dur. Un taxiway ceinturait l’aire de décollage et atterrissage avec aire de dégagement au sud des installations. Le ravitaillement se faisait depuis l’aire des hangars et les munitions étaient stockées dans l’ancien fort qui jouxtait les installations. Il y avait deux grands hangars et un plus petit au nord-est deu terrain. Le quartier général, les services et les parties communes étaient regroupés dans des casernements anciennement français (Caserne Dixmude) établis au sud-sud est du terrain. Une liaison ferroviaire par rail était aménagée avec Cherbourg-centre (à 5km). Il y avait deux aires de dispersion : une au nord et l’autre au sud qui pouvaient recevoir une vingtaine d’avions. Il y en avait 4 supplémentaires en construction en mai 1943. Ces aires de stationnement étaient reliées au terrain par des taxiways en béton. L’aérodrome était protégé par une batterie de 3 ou 4 canons de flak lourde et 6 de flak légère disséminés dans 11 positions fortifiées dans un périmètre de 5 km autour de l’aérodrome.

Dès 1940, des Me 109 du stab JG 27 stationnent devant hangars (Site Wikimanche, via François Robinard)

Les activités aéronautiques cessèrent à la mi-41. Les travaux et l’entretien des installations avaient nécessité l’emploi de 728 travailleurs non Allemands. Dès que les avions quittèrent la plate-forme, celle-ci fut recouverte de chevaux de frise et d’obstacles appelés tripodes (sauf pendant une courte période en mai 1943 durant laquelle une piste fut aménagée dans le sens Est /Ouest puis le tout fut de nouveau couvert d’obstacles mobiles et des tranchées furent creusées rendant une partie des installations inutilisables.
Il avait été occupé précédemment par :
– le 2.(F)/Aufkl.Gr.123 de juin 1940 à janvier 1941
– le 4.(F)/Aufkl.Gr. 14 de juin à novembre 1940
– le stab/JG 27 de juin à août 1940
– le 7/JG 77 de décembre 1940 à février 1941
– le II/JG 54 en février et mars 1941
– le III/JG 54 en mars 1941
Il abrita en outre les stations de commandement : Fi.H.Kdtr.E 8/VII Cherbourg de juin 1940 à juin 1941 et le Fi.Pi.Kdo.C 30/XII de janvier 1943 à juin 1944.

 

Le terrain fut très actif durant la bataille d’Angleterre (Site Wikimanche, via François Robinard)

Quand les Américains l’occupèrent à la fin du mois de juin 1944, c’est le 850th EAB qui travailla à la restauration des 2 aérodromes cherbourgeois  qui avaient été sabotés par les Allemands avant leur réédition : A 15 à l’est (Maupertus) et A-23 (Querqueville) à l’ouest.

Les sapeurs du 850th EAB s’activent sur la piste originelle qu’ils agrandissent fortement. Cette piste accueillera surtout des avions de transport (C47) qui effectueront de véritables norias entre l’Angleterre et le continent pour l’approvisionnement des troupes, en particulier un « pont aérien » établi avec l’aéroport de Reims (Marne) du 6 au 11 septembre 1944, pour accompagner l’avancée rapide des troupes US dans l’est de la France et faire face aux difficultés d’approvisionnement en carburant : 200 Douglas C-47 Skytrain transportant des jerrycans d’essence font la rotation entre les deux villes

(Source NARA via François Robinard)

Ils portèrent la longueur de la piste de 905 mètres à 1400. Occupé par les américains jusqu’en août 1945 qui le transformèrent en terrain affecté au transport en le rebaptisant T3 (pour Transport ou Terminal) a l’usage presque exclusif du Transport Command. Il fut également la base du tout nouveau chasseur de nuit Northrop P61 Black Widow, bourré d’électronique et annonçant une nouvelle façon de mener la guerre aérienne par contre-mesures électroniques. Ces avions étaient chargés en particulier de la défense de nuit des cieux parisiens.

Un chasseur de nuit Northrop P-61 Black-Widow, ultra-moderne pour l’époque survole le terrain de Querqueville bien visible sur la photo (Source NARA via François Robinard)

C’est également sur ce terrain que furent stationnés tous les avions prototypes ou à réaction allemands récupérés intacts avant leur embarquement pour les Etats-Unis. C’est l’opération Lusty, destinée à recevoir, entre autres, neuf Messerschmitt Me 262 et un Arado Ar 234 venant du terrain de Lechfeld, près d’Augsbourg en Allemagne, via Saint-Dizier et Melun, avant leur embarquement à Cherbourg sur le porte-avions britannique Reaper à destination des États-Unis.

Philippe Bauduin dans son livre l’Arado, l’avion espion, aux éditions Heimdal, rapporte :
« En juin 1945, les avions sont acheminés de l’Allemagne à Melun puis à Querqueville », dans l’actuelle École des Fourriers. Les Querquevillais d’alors se souviennent de ces avions au bruit formidable, jamais évoqués dans la presse : l’armée américaine se fait discrète. Les enfants venus chercher des chewing-gums auprès des GI, eux, ne les oublieront pas. Les quelque 40 avions sont ensuite déplacés sur des camions au Quai de Normandie, puis mis sur des barges qui rejoignent, toujours discrètement, le porte-avions Reaper accosté à la digue de Querqueville. Direction l’Amérique. »

Un Me 262 mis au goût américain et sous couleurs US est en attente de son « cocon » spécial avant d’être embarqué sur le P.A. Reaper (Coll Philippe Bauduin)

Les prises de guerre américaine embarquées sur le porte-avions direction les USA (Coll Philippe Bauduin)

Le terrain devint ensuite une base de l’aéronavale que la marine française cesse d’utiliser en 1948. Les bâtiments firent alors place à l’école des fourriers. En 1966 l’aérodrome disparaît et il ne subsiste rien des installations aujourd’hui. Son emprise est maintenant entièrement urbanisée.

François Robinard

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Pour plus d’information, nous vous recommandons le livre de François Robinard.

ISBN 9 782840 483274 – Editions Heimdal – Commande directe possible