Bourges 1940-1945

Frédéric Hénoff

Membre ABSA 1939-1945

Les tout premiers appareils qui, après l’Armistice, prennent possession de l’aérodrome (ou l’aéroport comme on l’appelle ici) de Bourges sont des Henschel Hs 126 de la 3.(H) Aufklärungsgruppe 13 (Armée de Terre/3ème Escadrille du groupe de reconnaissance n° 13). Durant la Campagne de France, cette escadrille a assuré des missions de reconnaissance au profit du 5ème Corps d’Armée. Cette formation va très vite quitter le Berry, vraisemblablement fin juillet ou début septembre 1940, pour l’Allemagne puis la Roumanie où elle va servir comme unité d’instruction.

A leur arrivée à Bourges, les Allemands mettent aussi la main sur quelques Curtiss Hawk H-75 qui étaient assemblés par la S.N.C.A. du Centre. À noter, le 14 août 1940, le décès d’un pilote de chasse du Ergänzungsjagdgruppe (Groupe d’entraînement et de remplacement) de Merseburg qui s’écrase avec son Curtiss H-75 A-4 alors qu’il réalise des acrobaties au-dessus du terrain.

La 3.(H) Aufklärungsgruppe 13 va rapidement côtoyer les bombardiers bimoteurs Heinkel He 111 du II./K.G. 27 Boelcke (deuxième groupe de l’Escadre de bombardement 27) car cette unité qui se trouvait sur le terrain de Marcq-en-Baroeul (Lille-Nord) à la fin de la Campagne de France a entamé, depuis le 30 juin, son transfert vers Bourges. Ce groupe est commandé, à cette époque, par le Major Friedrich-Karl Schlichting.

Témoignage de H. Wolf (4. Staffel) : « Après l’Armistice, le personnel navigant et les hommes mariés sont envoyés en permission à Wunstorf (aérodrome situé près de Hanovre). Ils doivent regagner Lille-Nord pour le 1er juillet. Le transfert vers Bourges qui va débuter le 30 juin doit être terminé pour le 2 juillet.« 

L’installation se fait dans les immeubles jouxtant l’aérodrome de Bourges, les Allemands ayant exigé l’évacuation de la cité-jardin de l’aéroport où vivaient des familles ouvrières. Pour les membres d’équipage et le personnel au sol, la « période d’adaptation » va être relativement courte car les missions contre l’Angleterre débutent dès le 8 juillet.

La plupart des décollages sont effectués en soirée ou de nuit mais ils peuvent survenir en pleine journée lorsque des missions sont dirigées contre des navires en Atlantique, au large de Brest. Pour des objectifs plus éloignés tels que Glasgow (Écosse), c’est le terrain de Dinard (Ille-et-Vilaine) qui est utilisé. Les bombardiers allemands décollent alors de Bourges dans la journée, rejoignent le terrain breton et, de là, effectuent leurs missions dans la soirée ou la nuit. Ce terrain est utilisé pour la première fois le 4 août 1940. Les autres aérodromes utilisés sont Lille-Nord et Merville et comme ceux-ci sont proches de l’Angleterre, il peut arriver qu’il y ait jusqu’à trois missions dans la même nuit.

Témoignage de H. Wolf (4. Staffel) : « Lors d’une mission de nuit sur Glasgow, notre appareil a reçu plus de quarante impacts dus à l’explosion d’un obus de DCA. La conduite d’huile du moteur droit a été sectionnée et le moteur a dû être stoppé. Sur un seul moteur, j’ai quand même réussi à maintenir l’altitude à 5500m, ce qui pouvait encore aller, mais à partir de cet instant nous allions effectuer une sorte de vol plané jusqu’à la base. A l’aube, nous avons franchi la côte anglaise avec seulement 1500m d’altitude et nous avons enfin atteint l’aérodrome de Bourges après 4h45 de vol.« 

Pour la période qui court du 8 juillet au 31 août 1940, on dénombre, pour le deuxième groupe de la K.G. 27, vingt-six journées d’engagements contre des objectifs ennemis soit pratiquement une mission tous les deux jours. Au 13 août 1940, le groupe compte 26 Heinkel He 111P dont 18 sont disponibles ainsi que 8 Heinkel He 111H dont 3 sont disponibles. Durant son séjour dans le Berry, la dotation du groupe sera toujours de 30 à 35 appareils.

Durant ce mois, cette unité va aussi perdre son Kommandeur lors d’un engagement de nuit au départ de Dinard. L’équipage au complet réussit à évacuer l’appareil qui s’écrase près de Wimborne dans le Dorset, les hommes se constituant prisonniers à leur arrivée au sol.

Voici le témoignage du Major Schlichting recueilli après sa captivité : « Le 11 août 1940, alors Kommandeur de la II./K.G. 27, je décolle de Dinard pour une mission sur l’Angleterre aux environs de 21h30 accompagné de 11 à 14 appareils. L’objectif est une usine d’aviation près de Bristol avec comme cible secondaire la zone portuaire d’Avonmouth. Le vol aller se déroule sans souci particulier mais l’usine ne peut être localisée parfaitement à cause de formations nuageuses et de brume au sol.

Notre appareil ainsi que tous les autres avions du groupe attaquent donc l’objectif secondaire. Comme nous en avons l’habitude depuis que les Britanniques en ont installé partout, durant l’attaque, notre avion est capturé par le faisceau lumineux d’un projecteur. C’est lors de notre vol retour que nous sommes attaqués par deux chasseurs de nuit, ces derniers nous occasionnant de sérieux problèmes car ils réussissent à nous attaquer plusieurs fois.

Les manœuvres de notre pilote pour leur échapper lui permettent enfin – aidé aussi peut-être par les tirs des armes de bord – de se dégager du faisceau de ce projecteur et de semer les chasseurs. Mais notre bombardier est durement touché. Un moteur est à l’arrêt, différentes parties de l’avion dont le tableau de bord et des instruments sont sévèrement atteints. Les conduits du circuit de carburant ont été certainement sectionnés.

Nous atteignons difficilement le nord des côtes sud de l’Angleterre sur un seul moteur et c’est pratiquement à cet instant que ce dernier nous lâche. Il ne nous reste plus comme seules possibilités que de tenter un atterrissage sur le ventre ou de sauter en parachute. Je choisis la seconde option d’autant plus que des membres de l’équipage ont été blessés durant le combat avec les chasseurs. L’Ofw. Löhning, le Major Brehmer et l’Ofw. Bendrich sautent les premiers puis, comme nous en étions convenus auparavant, l’Ofw. Frey saute depuis le cockpit et moi-même depuis l’arrière du fuselage.« 

C’est le Hauptmann Reinhard Günzel, Staffelkapitän de la 6./K.G. 27 qui, le 16 novembre 1940, succède au Major Schlichting comme Kommandeur du Gruppe.

A noter qu’à l’automne 1940, les Allemands ont entamé de grands travaux sur l’aérodrome avec notamment la construction d’une piste bétonnée de 1260 mètres ainsi que deux grandes zones de dispersion équipées de nombreux hangars pour avions (secteurs du chemin de Villeneuve et de la route de Châteauneuf). Comme l’écrivent MM. Cherrier et Pigenet : « L’aéroport où les Allemands entreprennent d’importants aménagements devient pour un temps le principal chantier de Bourges. » (Livre – Combattants de la Liberté) (1).

Pour la II./K.G. 27, les missions sur l’Angleterre se succèdent les unes aux autres avec des pertes en hommes et en machines qui, au fil des mois, deviennent importantes. En mai 1941, c’est donc logiquement que le groupe est retiré pour quelques jours des opérations afin d’être complété en équipages et en appareils.

Mais, à cette époque, se prépare le transfert de la plupart des groupes de bombardement opérant sur le front Ouest en vue d’une invasion de l’U.R.S.S. connue sous le nom d’Opération Barbarossa. Pour l’ensemble des groupes qui composent la K.G. 27 (sauf la IV. basée à Avord), ce déménagement intervient à la mi-juin 1941 et, le 14 juin, le II./K.G. 27 quitte Bourges via l’Autriche pour rejoindre le terrain de Focsani, une ville à l’est de la Roumanie. Afin de « masquer » ce départ, c’est la IV./K.G. 27 qui va être chargée « d’amuser » quelque temps les Britanniques. (Cf. La Luftwaffe à Avord 1940-1944 – Unités navigantes(2)

Pour l’anecdote, on peut aussi apercevoir sur l’aéroport des quadrimoteurs Focke-Wulf Fw 200, des appareils utilisés par la Commission d’armistice qui s’est installée à Bourges au début de l’été. Le lieutenant Baer qui est alors mitrailleur sur l’un de ces avions, en parle dans ses mémoires :

« Le Général d’aviation Max Mohr, inspecteur de la Luftwaffen-Kontroll-Inspektion, disposait d’une flotte de transport composée d’anciens avions Focke-Wulf Condor long-courriers de la Lufthansa, utilisés pour les liaisons au sein des États-Majors de contrôle de Casablanca et de Brazzaville.

Des pilotes de la Lufthansa étaient chargés de piloter les appareils, de vieux routiers expérimentés mais, de mon point de vue, de bien curieux soldats. En particulier, ils avaient l’habitude de piloter en pantoufles et en survêtement. J’en ai même vu fumer la pipe, ce qui était interdit. J’en avais les cheveux qui se dressaient sur la tête !

Avant d’être affecté sur un de ces avions, j’ai été détaché sur l’aérodrome de Bourges afin de me familiariser sur leur simulateur de tir avec l’utilisation des mitrailleuses de bord. Cette formation a duré huit jours et ensuite j’ai été fin prêt pour mon rôle de mitrailleur navigant sur les vols postaux à destination de l’Afrique.« 

C’est une escadrille de conversion opérationnelle équipée elle aussi de Heinkel He 111, la Ergänzungsstaffel de la K.G. 28, qui remplace la II./K.G. 27 à la date du 13 juin 1941. Cette unité composée vraisemblablement d’une douzaine de bombardiers fait partie d’une escadre de bombardement, la Kampfgeschwader 28, qui n’est plus composée à cette époque que d’un état-major d’escadre et d’un unique groupe. Ces derniers sont alors basés à Nantes mais ils vont être très vite transférés sur le front Est.

L’escadrille de conversion arrive de Celle en Allemagne certainement pour masquer elle aussi le départ massif de la plupart des escadres de bombardement qui opéraient à l’Ouest. Tout comme les quatrièmes groupes des escadres de bombardement, la mission principale de cette escadrille est de terminer la formation des équipages qui sortent des écoles avant de les envoyer au front.

Détail insolite, l’effectif de la Erg. Staffel K.G. 28 compte un instructeur de la Kriegsmarine. Le Leutnant-zur-See Paul Brasack a été détaché de la Marine de guerre pour servir dans la Luftwaffe comme instructeur. Il a en charge la formation des observateurs de cette unité et lorsque l’escadrille sera dissoute, il sera transféré à la IV./K.G. 4 d’Avord avant de regagner son arme d’origine. Nommé plus tard commandant de U-Boot (sous-marin), Paul Brasack sera décoré pour ses victoires de la Ritterkreuz (la Croix de chevalier).

Après six mois de fonctionnement sur le terrain de Bourges, l’Ergänzungsstaffel est renommée 11./K.G. 100 en décembre 1941 et, ce, afin de former la 11ème Escadrille du IV. Gruppe de la Kampfgeschwader 100.

Entre janvier et mai 1942, aucune unité particulière n’occupe l’aéroport mais le terrain sert de plate-forme d’entraînement, notamment pour la IV./K.G. 27 puis la IV./K.G. 4, toutes deux basées à Avord. Il semble aussi probable que, de par sa situation centrale, l’aérodrome serve d’escale ou de terrain de secours à de nombreux appareils allemands, à l’exemple de ce He 111 de la 10./K.G. 55 de Dijon qui, le 27 avril 1942, effectue un atterrissage d’urgence au retour d’une mission sur l’Angleterre.

Il faut attendre début juin 1942 pour voir arriver une nouvelle formation de la Luftwaffe. Au début du mois, ce sont les bombardiers bimoteurs Junkers Ju 88 de la IV./K.G. 77 qui prennent possession des infrastructures du terrain. Le rôle assigné à cette unité est le même que celui de son prédécesseur. La date exacte n’est pas connue mais la 11./K.G. 77 est envoyée à Rennes courant septembre.

Les vols de perfectionnement des équipages sont ponctués de missions de nuit sur l’Angleterre durant lesquelles les pertes commencent à devenir sérieuses pour les groupes de conversion qui se retrouvent en première ligne depuis l’ouverture du front Est. A titre d’exemple, les trois missions sur Birmingham, fin juillet 1942, impliquent cinq groupes de conversion sur les onze unités engagées et, durant ces raids, la IV./K.G. 55 de Dijon va jusqu’à perdre un quart de ses instructeurs !

Le 8 novembre 1942, les Alliés débarquent sur les côtes d’Afrique du Nord et les Allemands se mettent à redouter un prochain débarquement sur les côtes méditerranéennes. Coïncidence ou pas, les Allemands effectuent des mouvements d’unités depuis le 27 octobre en prévision d’une possible occupation de la zone libre sous le nom de code Stockdorf (en fait, un tel plan avait déjà été projeté en décembre 1940).

Dans cette opération, les appareils des quatrièmes groupes basés en France occupent un rôle essentiel et pour ce qui concerne les unités basées dans le Cher, la IV./K.G. 4 à Avord doit s’occuper des dépôts de stockage et la IV./ K.G. 77 des terrains d’aviation. L’invasion de la zone sud se produit le 11 novembre sans résistance de la part de l’armée d’Armistice.

Le débarquement attendu n’ayant pas eu lieu, la plupart des unités qui ont participé à l’opération Stockdorf et qui stationnaient sur les aérodromes du sud de la France regagnent leurs bases de départ dans le courant du mois de novembre. Ce n’est pas le cas de la IV./K.G. 77 qui quitte Bourges pour s’installer sur le terrain de Montpellier.

A noter que, lors des mouvements d’appareils effectués durant l’opération Stockdorf, des chasseurs monomoteurs de la célèbre Escadre de chasse J.G. 2 Richtofen se posent à Bourges le 9 novembre mais ne stationnent que quelques jours sur l’aéroport.

L’aérodrome ne reste pas longtemps inoccupé car, à partir de la mi-janvier 1943, arrive une formation qui va s’installer durablement à Bourges. Le 15 janvier 1941, c’est l’école de pilotage avancé Flugzeugführerschule C 15 (ou F.F.S. C 15) en provenance de Gablingen en Allemagne – ville située à quelques kilomètres au nord d’Augsbourg – qui s’y installe.

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Bourges – Siebel 204 de la Flugzeugführerschule B 15 en attente du feu vert pour son roulage.

(source : Famille Brasack)

La mission de cette école est de former des pilotes destinés au bombardement ou au transport. Cette formation, qui dure de trois à six mois, est sanctionnée par des licences de pilote de type C1 ou C2 connues également sous le nom de Erweiterter Luftwaffen-Flugzeugführerschein (licence étendue de pilote). Le programme exigeant de ces écoles réclame des instructeurs qualifiés dont quelques-uns sont d’anciens pilotes de la Lufthansa mais ils restent une denrée rare. Ces derniers sont des pionniers des vols long-courriers et ont appris à voler par tous les temps. Ils sont parmi les pilotes les plus expérimentés d’Allemagne mais ils ne sont cependant pas exemptés du service au front, avec les risques que l’on connaît.

En 1943, suite à la réorganisation totale du système de formation de la Luftwaffe le 15 octobre, l’école est rebaptisée F.F.S. B 15. C’est, pour la Luftwaffe, l’aveu d’un besoin urgent de pilotes de chasse et le signe que sa force de bombardement va décliner rapidement en s’émiettant petit à petit. En fait, à la fin de l’année 1943, le système de formation allemand est pratiquement incapable de fournir des pilotes entraînés au vol tous temps.

On peut se faire une idée des différents types d’appareils utilisés par l’école en prenant la liste des trente avions détruits ou endommagés lors du bombardement du 10 avril 1944 : Junkers Ju52, Heinkel He111P, Heinkel He177, Focke-Wulf Fw58, Siebel Si204A, Siebel Si204B.

Voici quelques extraits tirés de son journal de guerre :

  • 10 février 1943 : Prise de commandement du Major Dr. Herman Grote en remplacement de l’Oberstleutnant Alfred Traeger qui rejoint le XII Fliegerkorps à Zeist près d’Utrecht (Pays-Bas).
  • 3 mars 1943 : Début de la formation B2 sur la base aérienne d’Avord. (N.B. : Navigation avancée comprenant au moins 50 vols de nuit sur appareils bimoteurs).
  • 13 juillet 1943 : Suite à des tirs répétés contre des trains de permissionnaires, une section de la compagnie technique est dépêchée sur la ligne de chemin de fer Bourges – Nevers. Cette intervention a peu d’effet car les attaques se poursuivent dans les jours qui suivent.
  • 2 octobre 1943 : Sur la base aérienne d’Avord, début de la formation des équipages sur Heinkel He 177.
  • 15 décembre 1943 : À Avord, fin de la formation des 11 premiers équipages sur Heinkel He 177.
  • 16 février 1944 : Transfert du détachement des Heinkel He 177 vers la Flugzeugführerschule B31 de Brandis (Allemagne).
  • 30 avril 1944 : Sous le commandement du Sicherheitsdienst (SD) de Bourges, des soldats de l’école de pilotage ainsi que des troupes parachutistes sont déployés sur la commune de Beffes afin de lutter contre des bandes de terroristes. Personnel : 6 officiers, 230 sous-officiers; matériels : 1 automobile, 1 motocyclette, 2 camions et 2 canons.

La Flugzeugführerschule B 15 quitte Bourges le 15 mai 1944 suite à un ordre reçu le 8 mars précédent. Les bombardements de plus en plus nombreux ainsi que les incursions diurnes et nocturnes des chasseurs ennemis (notamment des Mosquitos de la Royal Air Force) perturbent la formation tout en entraînant de nombreuses pertes en équipages. L’école va donc se déplacer vers l’Est, à destination du terrain de Steinamanger (aujourd’hui Szombathely) en Hongrie.

Début décembre 1943, la 1./J.G. 105 (première escadrille) du Jagdgeschwader 105 (J.G. 105) vient rejoindre la F.F.S. B15 à Bourges. Le 19 mars 1944, lors de son transfert sur le terrain de Romorantin-Pruniers, elle est remplacée par le Stab (état-major) de la J.G. 105 et la 3./J.G. 105 (troisième escadrille). La 2./J.G. 105 (deuxième escadrille) stationne, quant à elle, sur l’aérodrome de Châteauroux-Déols.

Le groupe de chasse J.G. 105 a été formé fin février 1943 à partir de la Jagdfliegerschule 5, une école de chasse alors basée à Villacoublay. Son changement de nom est intervenu au printemps 1943 lorsqu’il a été demandé aux écoles d’entraînement spécialisé de dispenser une formation à vocation plus opérationnelle car le besoin en pilotes se faisait pressant (Sur ce sujet, voir aussi la F.F.S. B15). Le groupe utilise toutes sortes d’appareils tels que des Messerschmitt Bf 109G, des Arado Ar 96B, des Messerschmitt Bf 108, des Focke-Wulf Fw 56, des Bücker Bü 131 Jungmann, des Arado Ar 68, des Arado Ar 66 ainsi que des North American NA 57 (ces derniers appartenaient à l’Armée de l’Air française).

Après quelques mois, l’ensemble du groupe J.G. 105 est transféré vers Markersdorf (Allemagne) le 6 juin 1944 alors qu’intervient le débarquement des Alliés en Normandie.

Avant l’été 1944, une unité est spécialement constituée pour lutter contre la résistance : le Geschwader Bongart. Ce Geschwader  est formé à Charleville en avril 1944 à partir des III. et IV. Gruppen du Fliegerzielgeschwader 2 (Fl.Z.G.2) qui lui-même a été créé en février 1944. Cette unité se trouve sous les ordres de la Luftflotte 3 et aide à l’entraînement des unités antiaériennes allemandes en remorquant des cibles. Elle est dotée de la majeure partie des Reggiane Re 2002 construits pour la Luftwaffe. Le Geschwader Bongart est dissous en septembre 1944; il utilise un temps le terrain de Bourges afin d’y lancer ses opérations anti-terroristes. Très peu de renseignements concernant cette formation à l’existence très courte nous sont parvenus; c’est à partir de diverses sources que l’on peut reconstituer partiellement son histoire.

Au printemps 1944, l’activité de la résistance s’accroît dans le centre de la France alors qu’un débarquement allié se profile à l’horizon. Le 15 avril 1944, ordre est donné à l’Oberstleutnant Hermann-Josef Freiherr von dem Bongart de déplacer l’État-major de la Fliegerzielgeschader 2 (Fl.Z.G.2) sur le terrain de Bourges. Avec les II. et IV. Gruppen du Fl.Z.G.2, il a pour ordre de mener des opérations contre la résistance dans ce secteur sous le nom de Geschwader Bongart. Ce nom n’est qu’une désignation tactique temporaire donnée aux Geschwaderstab/Fl.Z.G.2, III./Fl.Z.G.2 et IV./Fl.Z.G.2.

Quelques dates concernant cette unité :

  • 7 juin 1944 : Durant la journée, le Geschwader Bongart, basé à Bourges, est en communication avec la 10./Fl.Z.G. 2 dans le sud de la France.
  • 9 juin 1944 : A midi, le Geschwader Bongart est informé d’un regroupement de maquisards près de Maréges (70 kms de Clermont-Ferrand). Le barrage de Maréges est protégé par une unité de Flak comprenant seulement 70 hommes. La Luftflotte 3 demande au Geschwader une reconnaissance aérienne et un passage à l’offensive si nécessaire.
  • 16 juin 1944 : Un Reggiane Re 2002 (Werk-Nr. 1256) effectue un atterrissage d’urgence à Amboiras (Haute-Vienne) suite à des combats contre des groupes de « partisans ».
  • 20 juin 1944 : Le Major Weyert, Kommandeur de la III./S.G. 4, s’envole de Villacoublay pour Bourges afin d’y rencontrer l’Oberst Bongart. Weyert s’envole ensuite vers Clermont-Ferrand pour y rejoindre son Gruppe. La III./S.G. 4 est maintenant subordonnée au Geschwader Bongart. Dix-neuf Focke-Wulf Fw 190 sont alors basés à Clermont-Ferrand, mais la III./S.G. 4 indique que l’aérodrome est trop petit car il ne dispose que de treize abris pare-éclats pour avions. (N.B. : Cf. La Luftwaffe à Avord 1940-1944 – Unités navigantes(2)
  • 29 juin 1944 : Dans la matinée, l’Oberst Bongart demande qu’il lui soit laissé une Staffel si le III./S.G. 4 venait à être transféré sur un autre théâtre d’opération.
  • 10 juillet 1944 : Stab (État-major) du Geschwader Bongart à Bourges, III. Gruppe avec les 7. et 8. Staffeln à Bourges et la 13. Staffel à Lissay-Lochy, IV. Gruppe avec les 11. et 12. Staffeln à Châteauroux.

Durant sa courte existence, le Geschwader Bongart utilise les aérodromes d’Avord, Bourges, Clermont-Ferrand et Lyon-Bron. Ses opérations, débutées dans la seconde moitié de mai 1944, ont perduré jusqu’à la mi-août 1944 et durant cette période l’unité s’est avérée brillante (aux dires de sa hiérarchie). Le Geschwader Bongart a accompli la mission pour laquelle il avait été créé mais, début septembre 1944, il devient obsolète du fait de la perte de la France par les Allemands. A ce moment-là, plus aucune unité anti-terroriste n’est nécessaire à l’Ouest. L’Allemagne doit maintenant défendre son propre sol.

Durant le mois de juillet et jusqu’aux premières destructions allemandes d’août 1944 – après que Hitler a donné l’ordre aux troupes de la Wehrmacht de l’Ouest et du Sud-Ouest de se replier vers l’Est et l’Allemagne – l’activité sur l’aéroport est quasiment nulle. Pourtant, quelques messages décryptés par les services de renseignement alliés indiquent que l’aérodrome est un centre d’évacuation de la Luftwaffe à l’activité irrégulière, tout comme ceux de Cognac et Dijon.

L’évacuation des derniers éléments de la Luftwaffe encore présents sur l’aéroport commence en août (N.B. : les ouvriers de l’usine aéronautique S.N.C.A. du Centre qui jouxte l’aérodrome sont au chômage depuis déjà quelques jours suite aux destructions des derniers bombardements); les premières explosions sont entendues à partir du 18 août lorsque les Allemands entreprennent le sabotage de leurs installations, démolissent les pistes et les hangars encore debout. Ces destructions ont pu être observées par la population berruyère car de larges colonnes de fumée montaient dans le ciel depuis ce secteur de la ville.

Encore quelques jours et la ville va être libérée. La Fliegerhorst Bourges a vécu.

Notes :

(1) Combattants de la Liberté – La résistance dans le Cher (Éditions sociales, Paris, 1976) 

(2) Extraction du site : https://airwar-18.blogspot.com/2018/09/la-luftwaffe-bourges-1940-1944-unites.html

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Autres unités allemandes présentes durant la seconde guerre mondiale :

Nom de code du Fliegerhorst Bourge E 229/XII

II./KG 27 (était présente au 31 mars 1941 → ?) avec He 111 en provenance de Dinard /Base de bombardiers.
Erg.St./KG 28 (juin 1941 → décembre 1941), Unité d’instruction
IV./KG 77 (? 1942 → mai 1943 ?) Unité d’instruction

Sources :

La Luftwaffe en France, tome 1 – Jean-Louis Roba