Les terrains du Third Aviation Instruction Center 1917-1919

(3e Centre d’Instruction pour l’Aviation)
Département de l’Indre

Introduction

A la différence d’autres Centres d’Instruction de l’Air Service (nom donné à l’époque à l’armée de l’air américaine) qui prirent la suite d’installations déjà créées par les français, comme ce fut le cas à Tours en Indre-et-Loire (Second Aviation Instruction Center), le Third Aviation Instruction Center à Issoudun fut une création exclusivement d’origine américaine, en France, en Bas Berry, sur des emplacements ne comportant à l’époque que quelques rares bâtiments agricoles et des terres cultivées.
Les plans originaux élaborés aux Etats-Unis prévoyaient une implantation près de l’agglomération d’Issoudun dans le département de l’Indre pour 250 officiers, 900 élèves et 4.300 hommes de troupes (source Gorrell – History of the American Expeditionary Forces Air Service 1917-1919 National Archives Serie G volume 9, p. 7).
Au début, il y eut un Camp Principal le long de la route Issoudun – Vatan (actuellement la D 960). Sa croissance fut très rapide et lorsque l’espace aérien devint trop restreint pour le nombre d’avions évoluant au-dessus, des champs d’aviation indépendants (des «Fields »), portant chacun un numéro d‘identification propre, furent créés. Au fur et à mesure des opportunités, les pilotes instructeurs choisirent des terrains isolés, où ils s’installèrent avec leurs élèves et à chaque fois une unité support spécifique
(source Gorrell – History of the American Expeditionary Forces Air Service 1917-1919 National Archives Serie G volume 9, p. 5).

Lorsque les combats cessèrent le 11 novembre 1918, à force de travail, le Third Aviation Instruction Center était devenu la plus grande école d’aviation au monde !

Hiram Bingham (habituellement plus connu comme le professeur/explorateur qui découvrit le 24 juillet 1911 la cité Perdue de Machu Picchu (BINGHAM (Hiram) – Lost city of the Incas. The story of Machu Picchu and its builders. Duell, Sloan and Pearce. New York 1948,  réed.  Phoenix 2003) assura en France avec le grade de Lieutenant-Colonel le commandement du Third Aviation Instruction Center, du 28 août 1918 jusqu’à noël 1918.

Dans ses souvenirs, il décrit de façon très expressive le Third Aviation Instruction Centre :
«L’histoire à Issoudun du Third Aviation Instruction Centre (le troisième Centre d’Instruction pour l’Aviation) est pleine de lumière et d’ombre. Situé sur les plaines arides entre les villages de Vatan et de Lizeray, le camp se trouvait à quelques miles (1,6 km) à l’ouest de la ville historique d’Issoudun, rendue célèbre par Balzac. Il était en plein cœur de la France, à environ vingt-cinq miles (40,23 km) au nord de Châteauroux, à soixante-cinq miles (104,60 km) au sud d’Orléans et vingt-cinq miles (40,23 km) à l’ouest de Bourges. Il n’était pas très éloigné de deux des plus grands dépôts d’approvisionnement américains : Gièvres (38) et Romorantin (41). Les terrains y étaient constitués d’argile mélangée avec de petites roches schisteuses (en réalité du calcaire). Les sols sont si pauvres que les villages et les fermes y sont relativement rares. Cela donnait de grands espaces nécessaires pour les champs d’aviation. Mais le sol imperméable à l’eau, qui ne sèche pas facilement pouvait facilement rester boueux pendant plusieurs jours. Afin de desservir l’endroit retenu, un chemin de fer américain long de neuf miles (14,48 km) fut construit pour se raccorder près d’Issoudun au réseau ferré français »  (BINGHAM  Hiram – An explorer in the Air Service. Formerly Lieutenant-Colonel, Air Service, U.S.A. New Haven. Yale University Press. London I. Humphrey Milford, Oxford University Press 1920. Copyright, 1920, by Yale University Press, p. 117 et 118).

«Le Troisième A.I.C, ainsi le dénommions-nous habituellement, se composait d’un Camp Principal où se trouvait le Quartier Général, l’hôpital, les bâtiments d’instruction, les magasins attachés, les entrepôts d’approvisionnement aéronautique, les ateliers de réparation, des casernements pour héberger environ 4.000 hommes, un terrain extérieur d’assemblage et de test, et, dans un rayon de 5 miles (8,04 km) une douzaine d’autres champs d’aviation, l’ensemble couvrant au total une cinquantaine de square miles (130 km2) de territoire français. Nous y avions plus d’un millier d’avions ce qui permettait d’accueillir environ le même nombre d’élèves. S’y trouvaient au début 5.000 hommes de troupe, un nombre qui fut rapidement augmenté jusqu’à un total d’environ 8.000 personnes : si l’on inclut les officiers, les hommes de troupe, les ouvriers chinois et les prisonniers allemands, tous occupés à maintenir cette école opérationnelle, notre fonction était de prendre les aviateurs qui avaient reçu leur formation préalable de vol ailleurs et leur donner une formation avancée ou de convoyage, en fonction des besoins de la guerre et des capacités d’observation, ou de convoyage, en fonction des besoins de la guerre et des capacités que les pilotes pouvaient révéler. Plus de 2.000 pilotes furent diplômés sur place »
(BINGHAM  (Hiram) – An explorer in the Air Service. Formerly Lieutenant-Colonel, Air Service, U.S.A. New Haven. Yale University Press. London I. Humphrey Milford, Oxford University Press 1920. Copyright, 1920, by Yale University Press, p. 118).

Les débuts du Third Aviation Instruction Center à l’ouest d’Issoudun

Le 6 avril 1917, le Congrès américain vote la reconnaissance de l’état de guerre entre les Etats-Unis et l’Allemagne. En mai 1917, John Joseph Pershing est nommé commandant en chef du Corps expéditionnaire américain en Europe. Il débarque le 13 juin 1917 à Boulogne-sur-Mer (62) avec un état-major restreint.

Vierzon Cher défilé des troupes américaines 28 juillet 1917 anciens aérodromes

Arrivée du premier groupe d’élèves américains du Third Aviation Instruction Center. Les premiers américains du 3AIC arrivant par Vierzon. (Coll Didier Dubant, membre 2A)

Le Commandant Joseph Tulasne, dans le cadre de la Mission Française Joffre-Viviani aux Etats-Unis recommande le 8 mai 1917, dans un mémoire adressé au chef de l’Air Service le Général George Owen Squier, ‘’que les Etats-Unis établissent un relais en France, où les pilotes américains pourront s’acclimater et recevoir leur ultime formation avant de rejoindre le front. Le projet est approuvé à Washington par le Major General Tasker Howard Bliss (Chief of Staff), le 19 mai 1917. Il est décidé de détacher le personnel nécessaire de la Section Aviation du Signal Corps et d’envoyer par bateau en France le matériel nécessaire pour faire édifier l’école d’aviation. Plusieurs sites sont sélectionnés et celui d’Issoudun est chaudement recommandé par les autorités françaises qui sont très satisfaites du fonctionnement de l’Ecole d’Aviation militaire de Châteauroux – La Martinerie qui est située dans le même secteur géographique
(source Gorrell – History of the American Expeditionary Forces Air Service 1917-1919 National Archives Serie L volume 11, p. 165 et History of designs & projects division and construction division of the Air Service. American Expeditionary Forces, France December 31, 1918 p. 3 dans Gorrell  Serie L, volume 11).

Le vendredi 22 juin 1917, la presse locale («Le Journal d’Issoudun ») annonce : «le grand centre d’aviation de nos alliés américains va être installé aux portes d’Issoudun, entre Neuvy-Pailloux et La Champenoise, dans les vastes plaines de notre «Champagne berrichonne ».
Ce sera le centre d’une activité exceptionnelle dont profiteront largement nos populations environnantes. Sous peu, nous aurons là une armée de 4 à 5.000 pilotes américains avec tous ses services et ses installations.
L’endroit ne pouvait être mieux choisi dans un immense camp tranquille, éloigné de toute agglomération, d’usines ou constructions pouvant nuire aux évolutions des aviateurs » (Le Journal du Département de l’Indre vendredi 22 juin 1917, p. 2).

Dès le mois de juillet 1917, un détachement du génie français pose une voie de chemin de fer pour permettre au sud d’Issoudun le raccordement du futur camp américain, à la voie ferrée Paris Toulouse (source Gorrell – History of the  American Expeditionary Forces Air Service 1917-1919 National Archives Serie G volume 9, p. 7 et 37).

Les premiers américains qui arrivent à Issoudun le 1er août 1917, sont les hommes du 29th Provisional Aero Squadron. Installés à partir du 17 août 1917 dans des tentes au nord de la route Issoudun – Vatan (actuellement la D 960), ces hommes placés sous le commandement du «1st Lt Lawrence S. Churchill » de l’Air Service, commencent dès le 27 août 1917 à établir au sud de la route les premiers bâtiments en bois du futur Camp Principal et aident les français à mettre en place la voie ferrée. Deux cents prisonniers de guerre allemands sont mis à disposition par les autorités françaises pour participer aux travaux de construction du Camp Principal.
Le 12 septembre 1917, débute la construction du premier bâtiment affecté à la Red Cross (la Croix Rouge américaine). Il sera achevé le 20 septembre 1917.

Le 24 septembre 1917, environs mille hommes stationnent au Camp Principal et l’effectif des prisonniers de guerre engagés dans les travaux de construction est d’environs six cents hommes (source Gorrell – History of the  American Expeditionary Forces Air Service 1917-1919 National Archives Serie G volume 9, p. 37-38).

Le 1er octobre 1917, une dotation de quelque dix ou quinze avions Nieuport arrive en caisse.  Un pilote de chasse expérimenté de l’armée de l’air française, le Capitaine Prosper Pélissier, porteur de la Légion d’honneur et jusque-là affecté dans une escadrille au front, se retrouve chargé d’organiser l’instruction des pilotes américains. Il rejoint le Camp américain d’Issoudun le 6 octobre 1917 et trouve un seul baraquement achevé, d’autres en partie construits, un terrain très sommairement aménagé, quarante-huit hangars Bessonneau vide tous alignés sur une rangée et dans lesquels les caisses des Nieuport non montés attendent.
L’ouverture de l’école est prévue officiellement pour le 15 octobre 1917.
Ce ne fut qu’au prix de longues heures de travail et sous un éclairage de fortune que cinq mécaniciens français furent capables de préparer pour la date prévue trois avions Nieuport. Ils furent emmenés sur le terrain de vol, le matin du 15 octobre 1917, en présence de tous les hommes des différents Squadron, qui pour certains n’avaient jamais vu jusque-là un aéroplane de près. Le vol initial fut effectué à bord d’un Nieuport par le Lieutenant Pierre Fauville, un pilote français, que le Capitaine Prosper Pélissier avait amené avec lui pour l’assister dans sa mission d’instruction. Le terrain ressemblait plutôt à une lande labourée abandonnée. L’appareil décolla correctement, mais termina son atterrissage sur le nez, fort endommagé. Le Capt. James Ely Miller qui avait pris un second appareil effectua pour sa part un atterrissage sans problème.
Ainsi se déroula l’ouverture officielle de l’école !
L’instruction ne débuta réellement que le 24 octobre 1917 avec les deux autres appareils (source Gorrell – History of the  American Expeditionary Forces Air Service 1917-1919 National Archives Serie G volume 9, p. 10, 11 et 40).

Le 25 octobre 1917, le «1st Lt Lawrence S. Churchill » cède son commandement au  Capt. James E. Miller de l’Air Service.
Le 29 octobre 1917, le Major General John Joseph Pershing, arrive au Camp américain d’Issoudun à bord de son train privé par la voie ferrée nouvellement construite. Le chef  du Corps expéditionnaire américain en Europe constate alors que l’ouverture de l’école a été plus que prématurée : deux baraquements, quarante-huit hangars Bessonneau et des constructions dépareillées méritaient- elle une inspection ?
Les critiques faites par le commandant en chef furent d’autant plus prises à cœur par le personnel que précisément pendant cette période des pluies continuelles avaient transformé le sol argileux du site en océan de boue, rendant compliqué la moindre action. Un autre facteur qui avait contribué à la démoralisation des hommes était le temps considérable que mettait à l’époque le courrier à arriver des Etats-Unis (source Gorrell – History of the  American Expeditionary Forces Air Service 1917-1919 National Archives Serie G volume 9, p. 11 et 40).

Le 2 novembre 1917, le Capitaine James E. Miller est remplacé par le Capitaine Carl Spatz, de l’Air Service. Le Capitaine Carl Spatz en prenant son commandement se retrouve en charge de transformer le trou le plus boueux de France («Worst Mudhole in France »), selon l’expression même du Major General John Joseph Pershing, en un lieu habitable.
Dans les jours qui suivent les progrès des travaux de construction sont tels que dès la fin du mois de novembre 1917, étaient sortie de terre : sept baraquements, deux magasins d’habillement et un hôpital, mais l’on n’était pas encore parvenu à chasser la boue omniprésente qui gênait toute circulation et l’activité des avions (source Gorrell – History of the American Expeditionary Forces Air Service 1917-1919 National Archives Serie G volume 9, p. 14).

« Le Camp Hôpital n° 14 a été crée le 15 Octobre 1917, à Issoudun, département de l’Indre. De taille moyenne, il a servi pour le Third Aviation Instruction Center. Le personnel a été engagé localement. A son ouverture, l’hôpital a été logé dans un bâtiment de la Croix-Rouge américaine, 7,62 m par 18,28m, mais plus tard, lorsque la construction de l’hôpital a été terminée, il se composait d’une construction comportant dix-sept services, bâtiment de chirurgie, quartiers et cantines pour le personnel. Sa capacité normale était de 575 lits. Au cours de son existence, cet hôpital a pris en charge environ 7.000 cas chirurgicaux et médicaux. Le Camp Hôpital n° 14 a cessé de fonctionner le 15 avril 1919. Son personnel a embarqué le 25 mai 1919 à Bordeaux à destination de Chicago et fut démobilisé au Camp Dodge, dans l’Iowa, le 17 juin 1919 »
(libre traduction D. Dubant, source : Colonel Joseph H. Ford, MC – THE MEDICAL DEPARTMENT OF THE UNITED STATES ARMY IN THE WORLD WAR. VOLUME II : ADMINISTRATION. AMERICAN EXPEDITIONARY FORCES. United States Government Printing Office, 1927, p. 755).

Le 25 novembre 1917, le Lt. Col. Walter G. Kilner de l’Air Service prend la suite du Capitaine Carl Spatz qui reste sur place en temps qu’officier chargé des entraînements. Peu après la prise de commandement du Lt Col. Walter G. Kilner sort le premier numéro de «Plane News », un journal conçu et imprimé par les soldats américains affectés au Third Aviation Instruction Center (source Gorrell – History of the American Expeditionary Forces Air Service 1917-1919 National Archives Serie G volume 9, p. 41-42).

La grande phase d’expansion du Third Aviation Instruction Center (nov. 1917 – nov. 1918)

Ce fut sous le commandement du Lt. Col. Walter G. Kilner, puis à nouveau sous celui de Carl Spatz temporairement promu Major et qui lui succéda le 14 mai 1918 qu’eut lieu la grande phase d’expansion du Third Aviation Instruction Center. De nouveaux champs d’aviation (Field) furent acquis et les capacités de l’école considérablement accrues (source Gorrell – History of the  American Expeditionary Forces Air Service 1917-1919 National Archives Serie G volume 9, p.17).

Dès le début deux champs d’aviation différents furent utilisés : le Terrain Principal (qui par la suite fut dénommé Field n° 2) et le terrain pour les Rouleurs (dénommé par la suite Field n° 1) (source Gorrell – History of the  American Expeditionary Forces Air Service 1917-1919 National Archives Serie G volume 9, p. 17).
Au début du mois de novembre 1917, pour tenir compte de la progression des élèves, un nouveau  champ d’aviation fut mis en activité à l’est du centre bourg de Saint-Valentin pour l’apprentissage du vol en formation (le Field n° 7, commune de Saint-Valentin).
Ces différents terrains, sommairement aménagés, ne comportaient aucune installation. Seul le Terrain Principal disposait de constructions. Aussi chaque jour les avions rejoignaient-ils pour la journée les terrains où s’effectuait l’instruction et revenaient en fin de journée au Terrain Principal (source Gorrell – History of the  American Expeditionary Forces Air Service 1917-1919 National Archives Serie G volume 9, p. 17).

Le 4 décembre 1917 un nouveau terrain est pris à bail aux français pour permettre aux élèves pilotes d’effectuer en toute sécurité le «Cross-country », le travail en altitude et les  acrobaties. Ce terrain situé sur la commune de Lizeray au nord-est du centre bourg et à faible distance du Camp Principal fut dénommé le Field n° 6.

Le développement de l’activité du Third Aviation Instruction Center entraîna  l’utilisation de nouveaux champs d’aviation et l’extension de certains déjà en usage. Ainsi dès le milieu du mois de décembre 1917 tous les pilotes qui utilisaient le Field n° 7 purent s’installer en permanence dans les baraquements qui venaient d’y être édifiés.
A partir de la fin du même mois de décembre 1917, sur la commune de Lizeray un petit terrain désigné en tant que Field n° 4 (situé le long le long de la route Issoudun – Vatan et à l’est du Camp Principal) et encore plus à l’est un autre terrain désigné en tant que Field n° 5 (commune de Lizeray) furent loués aux français, puis aménagés et rendu opérationnel.
Dès la fin de l’hiver 1917-18, tous les Nieuport 15m2 – 80 HP furent ainsi regroupés sur le Field n° 5 qui leur fut totalement dévolue. Le Field n° 5 sera ensuite agrandi par l’ajout d’une pièce de terre complémentaire le 27 mai 1918.
Des baraquements et des hangars sont érigés sur le Field n° 4 au printemps 1918. Le Field n° 4 fut alors en mesure d’héberger tous les Nieuport 18m2 (source Gorrell – History of the  American Expeditionary Forces Air Service 1917-1919 National Archives Serie G volume 9, p. 18).

En février 1918, le Field n°  8 (commune de Saint-Valentin) au nord-ouest du centre bourg de Saint-Valentin est loué aux français et le terrain devient opérationnel le 1er mars 1918 (source Gorrell – History of the  American Expeditionary Forces Air Service 1917-1919 National Archives Serie G volume 9, p. 18).

Le 16 mars 1918, le Secrétaire de la Guerre Newton D. Baker visite, avec le Président du Conseil Georges Clemenceau et le Major General John Joseph Pershing le Third Aviation Instruction Center (source Gorrell – History of the  American Expeditionary Forces Air Service 1917-1919 National Archives Serie G volume 9, p. 42).

D’autres modifications et agrandissements dans le voisinage du Camp Principal furent à l’origine de la création du Field n° 3. Les Fields n° 1, 2 et 3 s’étendaient autour du Camp Principal et servaient en partie de zone de test pour les avions livrés au Camp où ceux sortant des hangars de réparation après une simple réparation où une totale reconstruction (source Gorrell – History of the  American Expeditionary Forces Air Service 1917-1919 National Archives Serie G volume 9, p. 18).
Le premier entraînement sur le Field n° 3 eut lieu le 11 mars 1918 quand quelques avions Nieuport 23m2 furent amenés du Field n° 2 (source Gorrel – History of the  American Expeditionary Forces Air Service 1917-1919 National Archives Serie G volume 9 p. 297).
Sur le Field n° 3, l’élève qui avait été avec un moniteur sur le Field n° 2 se retrouvait seul aux commandes.

A la date du 20 avril 1918, le Third Aviation Instruction Center est constitué du Camp Principal et de huit terrains d’entraînement périphériques (Fields 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8), situés dans un rayon de 5 miles (8, 04 km) autour du camp principal. Le Camp Principal abrite l’Etat-Major, un hôpital, des magasins, des garages, l’intendance, des baraquements pour officiers et hommes de troupe, des hangars pour le stockage et les essais, ainsi que des camps pour les prisonniers de guerre allemands et les ouvriers chinois. Sur les terrains périphériques existent des baraquements permettant l’hébergement des officiers et hommes de troupe, ainsi que les hangars et les magasins pour les aéroplanes nécessaires à l’entraînement (source Gorrell – History of the  American Expeditionary Forces Air Service 1917-1919 National Archives Serie L volume 11, p. 172).

Le 27 mai 1918, les terrains constituant le Field n° 9 (commune de Ménétréols-sous-Vatan) situés au nord-ouest du centre bourg de Ménétréols-sous-Vatan furent loués et  en juin 1918 rendus opérationnels. La création du Field n° 9 était la conséquence d’un réaménagement. En effet, comme il était apparu que les Field n° 5 et  n° 6  ne disposaient pas d’assez d’espace pour y voler en tout sécurité, le Field n° 4 fut abandonné en tant que structure autonome et transformé en extension et terrain d’atterrissage des Fields n° 5 et  n° 6 qui étaient utilisés pour les vols en «cross-country », les spirales et le travail en altitude des Nieuport 15m2. Tout l’entraînement des Nieuport 18m2 qui s’effectuait jusque-là sur le Field n° 4 fut alors transféré sur le Field n° 9.
Le Field n° 9 fut lui-même agrandi le 1er juillet 1918 (source Gorrell – History of the  American Expeditionary Forces Air Service 1917-1919 National Archives Serie G volume 9, p. 18).

Le 28 août 1918 le Third Aviation Instruction Center passe sous le commandement du Lieutenant-Colonel Hiram Bingham.

L’arrivée pendant l’été 1918 depuis les Etats-Unis d’appareils De Havilland (DH-4 à moteur Liberty) et la nécessité de former sur cet appareil des pilotes d’observation rendit nécessaire la création d’un nouveau terrain séparé, ce fut le Field n° 10 (commune de Lizeray) au sud du centre bourg de Lizeray. Le Field n° 10 ne fut opérationnel que le 21 septembre 1918. Ce jour là vingt-six étudiants y débutaient leur instruction sur douze De Havilland (DH-4)  (source Gorrell – History of the  American Expeditionary Forces Air Service 1917-1919 National Archives Serie G volume 9, p. 21 et 191).

A un certain moment, fut ressentie au sein du Third Aviation Instruction Center, la nécessité de disposer d’un terrain pour former les pilotes devant rejoindre les Corps d’armée. Ce fut le Field n° 12 (commune de Ménétréols-sous-Vatan) situé à l’ouest du Centre bourg de Ménétréols-sous-Vatan. Le terrain fut loué le 1er octobre 1918 et le travail sur Avro y débuta peu après (source Gorrell – History of the  American Expeditionary Forces Air Service 1917-1919 National Archives Serie G volume 9, p. 21 et 333).

Voilà ce que précise Hiram Bingham : «Au moment où l’Armistice fut signé, nous commencions à recevoir d’Angleterre les Avro que nous attendions depuis plusieurs mois. Afin de mettre en place un vaste programme, un excellent terrain avait été préparé et baptisé Field 12… Nous aurions tous, sans exception, préféré avoir des Avro pour assurer la plus grande partie de nos formations … …cependant, certains de nos pilotes les plus expérimentés ont eu du mal à admettre la nécessité d’adopter un plan de formation d’origine britannique et nous n’avons jamais obtenu le meilleur parti de ce plan de formation qui nous avait si généreusement été transmis par l’agent de liaison de l’aviation britannique » (BINGHAM  (Hiram) – An explorer in the Air Service. Formerly Lieutenant-Colonel, air service, U.S.A. New Haven. Yale University Press. London I. Humphrey Milford, Oxford University Press 1920. Copyright, 1920, by Yale University Press, page 144).

Quand au Field n° 11 (communes de Neuvy-Pailloux et La Champenoise), où aurait du s’effectuer la formation des pilotes à la poursuite de nuit, il resta à l’état de projet (source Gorrell – History of the  American Expeditionary Forces Air Service 1917-1919 National Archives Serie G volume 9, p. 21).

Le 23 novembre 1918, le journal “Plane News” en page 5 titre “Worst Mudhole in France” becomes world’s greatest flying center. Despite adverse conditions Third A. I. C. has been made advance training where pilots are put through severe course which determines their fitness to fly” (Plane News, November  23 1918 p. 5)

A cette liste de terrains, il faut ajouter la prise à bail le 29 novembre 1917 d’un terrain devant servir de cimetière, terrain que les élèves pilotes dénommèrent par superstition : le Field n° 13. Des accidents mortels se produisirent dans l’hiver qui suivit. Le premier survint le 20 décembre 1917 lorsque le 1st. Lt. James D. Paull A.S. s’écrasa au sol sur le Field n° 5 en effectuant une vrille (Gorrell – History of the American Expeditionary Forces Air Service 1917-1919 National Archives Serie J volume 9 “3rd Aviation Instruction Center” p.305) et le  deuxième le 21 janvier 1918 quand le Cdt Ernest Hunnewell Leach se tua (Diary of a WWI pilot ambulances, planes, friends. Harvey Conovers’s adentures in France 1917-1918. Présented by Frances Conover Church. Editor, John Church, 2004 p. 235 et (http://net.lib.byu.edu/estu/wwi/memoir/AFShist/Mem2.htm).

La carte des champs d’aviation du Third Aviation Instruction Center,  figurant dans GORRELL Serie J vol 9 et intitulée «MAP OF OUTLYING FIELDS – 3e AIC », comporte au nord-est d’Issoudun un autre terrain portant l’indication «Abandonned site Field 11 ».   Ce site surnommé localement le Camp de Chenevière devint à partir de juin 1918 un dépôt de munitions d’armées légères. Grâce à la présence de ce dépôt géré par le génie américain, les hommes et des élèves pilotes du Third Aviation Instruction Center pouvaient disposer des armes et les munitions nécessaires à leur entraînement au tir.

Ce site est décrit dans l’ouvrage : Historical Report of the Chief Engineer including all operations of the Engineer Department. American Expeditionary Forces 1917-1919 :
«Le dépôt de munitions d’Issoudun
Pour le stockage de munitions d’armes légères, un dépôt avec 446.600 pieds carrés (41.490 m2) d’espace de stockage couvert  fut construit  en un point situé à 4,8 miles (7,68 km) à l’est d’Issoudun, dans la Section Intermédiaire Ouest, en connexion avec la branche de Bourges du chemin de fer Paris-Orléans. Le projet commencé en juin 1918, était pratiquement achevé à la date du 11 Novembre (1918) et des munitions depuis quelque temps y étaient reçues et stockées. A l’exception de casernements démontables pour abriter le personnel, peu de matériel, pour la construction de ce dépôt, fut fourni directement par les Français. Du matériel de voie, ainsi que des traverses d’origine américaine furent utilisés et la tôle ondulée qui couvrit les warehouses (les entrepôts) fut également apportée des États-Unis. Les liens, les poteaux et le bois utilisés furent fournis par les troupes  du Génie forestier (américain). Le plan approuvé prévoyait  trente et un entrepôts, de 50 x 308 pieds (15,24 m x 93,87 m). Vingt-neuf furent achevés avant que les travaux de construction ne soient interrompus. Ils étaient d’un modèle de construction à ossature de bois et tôle ondulée similaire à ceux érigés à Saint-Loubès (Gironde) pour le stockage des munitions, sauf que le toit et une fenêtre à chaque extrémité étaient couverts de tôle ondulée. Le matériel stocké était en outre protégé par des revêtements en toile. Les bâtiments étaient implantés avec suffisamment d’espace entre eux pour réduire  au maximum le risque d’incendie et les effets d’une possible explosion. Les voies ferrées furent implantées autant que possible en suivant la topographie du  terrain, pour réduire  les remblais. Un total de 56.200 pieds linéaires (17.129,76 m) ou 10,6 miles (16,96 km) de voies ferrées furent posés sur un remblais en terre, faute de pouvoir obtenir des scories ou du gravier. A l’exception de quatre voies ferrées de stockage sur neuf qui étaient prévues, pratiquement toutes les voies autorisées furent construites. Une plate-forme pour locomotive à charbon et des installations d’approvisionnement en eau, d’une capacité de 28.800 gallons d’eau (109.020 litres) toutes les 24 heures à la fois pour les locomotives et l’utilisation du camp, furent construites. Près d’un mile de route (1,6 km) fut nivelé et refait en surface » (libre traduction Didier Dubant de Issoudun ammunition depot in Historical Report of the Chief Engineer including all operations of the Engineer Department. American Expeditionary Forces 1917-1919. Washington Government Printing Office 1919 p. 320).

Les américains en partant ne laissèrent pas un emplacement réellement sécurisé comme le montre l’article de presse suivant : «Destruction d’explosifs.  Le Maire d’Issoudun a l’honneur de faire connaître à ses administrés que la destruction par explosion des engins enterrés par les Américains dans le terrain Porteau-Chenevières, aura lieu au camp, probablement à partir du 15 septembre, tous les jours, dimanche excepté, de 14 à 17 heures. La population est invitée à ne pas dépasser la ligne des vedettes pendant la destruction, à ne pas circuler dans le camp, attendu qu’il y a danger de mort à ne pas se conformer à cette prescription. Issoudun le 14 septembre 1919. Le Maire, J. Boisfard » (Le Journal d’Issoudun du 14 septembre 1919 p. 1)
Les terrains du Camp de Chenevière ne furent rendus définitivement à leurs propriétaires qu’en mai 1921 : «Cessation de l’occupation temporaire des terrains qui ont été occupés pour l’installation du dépôt de munitions du camp de Chenevière. Le Maire d’Issoudun, en exécution d’une lettre de M. l’Officier d’administration du Génie, à Châteauroux, à l’honneur d’aviser ses administrés qui possédaient des terrains aux lieux dits La Pièce de la Bergerie et des Pieds Pourris, que M. le Ministre a prescrit la cessation de l’occupation temporaire de ces terrains. En conséquence, ces propriétaires devront se rendre sur le lieu du terrain, le 3 mai 1921, à 13 heures 30, à l’effet de procéder contradictoirement avec l’adjudant Brouillard, représentant l’administration de la Guerre, à l’établissement des procès-verbaux des dégâts ou dégradations survenues pendant l’occupation. Issoudun le 26 avril 1921 Le Maire, Conseiller Général de l’Indre Jamet » (Le Journal d’Issoudun du jeudi 28 avril 1921 p. 2).

Petit bilan de l’activité aérienne sur les terrains d’Issoudun en 1917 et 1918

«Très peu de vols ont été effectués à l’automne 1917, mais dès décembre (1917) les registres montrent un total de 1.117 heures de vol dans le mois, chiffre qui augmenta en janvier (1918)  avec 2.812 heures, en février avec 3.414 heures, en mars avec 4.205 heures et en avril avec 7.392 heures.
Il y eut une légère baisse à la fin mai et en juin, due à des causes diverses, mais principalement aux grandes difficultés rencontrées pour maintenir les Nieuport en état de vol lorsque le  vent est chaud à la fin du printemps.
En juillet (1918) le temps de vol est repassé à 9.350 heures, en août à 12.510 heures, repassant fin septembre à 9.562 heures.
Mais c’est sous la direction très compétente de Capitaine H.C. Ferguson que tous les records furent battus en octobre (1918) avec un total de 17.113 heures dans le mois.
En novembre (1918), après que l’Armistice eut été signée, la pression est retombée et nous avons volé seulement 10.041 heures » (BINGHAM  (Hiram) – An explorer in the Air Service. Formerly Lieutenant-Colonel, air service, U.S.A. New Haven. Yale University Press. London I. Humphrey Milford, Oxford University Press 1920. Copyright, 1920, by Yale University Press, page 126).

L’évolution du Third Aviation Instruction Center après l’armistice

Immédiatement après l’Armistice, l’instruction des pilotes en cours de formation fut poursuivie normalement jusqu’à achèvement des programmes prévus, ce qui amena la fermeture progressive des différents «Fields » (source Gorrell – History of the  American Expeditionary Forces Air Service 1917-1919 National Archives Serie G volume  9, p. 32).
Quant aux terrains, si la presse locale évoque dès le mois de décembre 1919 des opérations de «démontages des baraquements » (Le Journal du département de l’Indre du lundi 15 décembre 1919 p.1), ils ne furent complètement débarrassés de leurs différents types de bâtiments qu’en 1922 comme le montre l’annonce suivante :
«Vente de Matériaux de Construction au Camp de Rouze (c’est-à-dire le Camp Principal). Provenant  de démolition de vastes hangars. Planches sapin et peuplier, bois de charpente sapin et peuplier. Verre rayé en grandes feuilles. Tôles ondulées neuves pour couvertures. Carreaux de plâtre pour cloisons. Briques doubles pleines et pressées. Socles en ciment, cornières fer, bâches neuves et usagées, etc. Tous ces matériaux sont abrités dans un groupe de 4 hangars auprès du petit bois de Rouze (premier chemin ferré sur le camp en venant d’Issoudun). S’adresser à M. Bridier. Les dimanches et jours fériés, la vente n’a pas lieu » (Le Journal d’Issoudun du jeudi 13 avril 1922 p. 4).

Les différents camps d’aviation –  Fields

Field 1  : Lizeray 1</FONTLizeray 1

Field 2  :  Lizeray 2</FONTLizeray 2

Field 3  :  Paudy 1</FONTPaudy 1

Field 4  :  Liseray 3</FONTLiseray 3

Field 5  : Liseray 4</FONTLiseray 4

Field 6  : Liseray 5</FONTLiseray 5

Field 7  : Saint-Valentin 1</FONTSaint-Valentin 1

Field 8  : Saint-Valentin 2</FONTSaint-Valentin 2

Field 9  : Ménétréols-sous-Vatan 1</FONTMénétréols-sous-Vatan 1

Field 10 : Liseray 6</FONTLiseray 6

Field 12 : Ménétréols-sous-Vatan 2</FONTMénétréols-sous-Vatan 2

Field 13 : Paudy 2</FONTPaudy 2

Field 14 : La Champenoise 1</FONTLa Champenoise 1

Didier Dubant, membre 2A, juillet 2012.