Juvincourt – Berry-au-Bac

 

PaysFrance
DépartementAisne
NomJUVINCOURT - BERRY-AU-BAC
Autre appellationJUVINCOURT
Commune(s)JUVINCOURT-ET-DAMARY
LA VILLE-AUX-BOIS-LES-PONTAVERT
CORBENY
Coordonnées49°25’54’’N / 3°53’06’’E
OACIN/A
SituationEntre LAON et REIMS
Autres rubriques

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Limites du terrain en 1939 (Jacques Calcine, membre 2A)

Occupations successives du Terrain jusqu’à la Libération :

Prise en charge par la CA 72/112 (voir Neufchatel-Proviseux) du 27/08 au 22/10/39, terrain livré à la RAF à/c du 10/10/39, installation d’un phare de rappel, démonté le 19 mars 1940.

Au 25/11/39, sont notées 1 batterie anglaise et 2 batteries FTA du groupe 1/312 (4 c. de 75 mm Mle 97-39)

  • 76ème Wing RAF / Sqdn 12 (du 02/09 au 08/12/39) et 142 (du 02 au 12 puis du 16/09/39 au 16/05/40), chacun 16 Fairey Battle.
  • Sqdn 1 (Hurricane) du 11 au 19/04 puis du 10/05 à l’évacuation du terrain le 17/05/40 (RAF Squadrons)

Le Terrain est répertorié d’octobre 1940 à juin 1944 par la Luftwaffe comme « Flugplatz Juvincourt « , et il est doté de trois pistes de 1575 m bétonnées, balisées, équipées de rampes d’approche Lorenz et de systèmes de percée ; deux zones de dispersion totalisent 38 abris, et la défense antiaérienne est assurée par un bataillon de Flak composé d’une batterie de 6 canons de 88 mm et 9 sections de 4 canons de 20 et 37 mm.

Unités affectées :
– III / KG 77 ( « ) de février à juin 41
– Stab KG 77 (Ju 88A) du 09/03 à juin 41
– I / KG 77 ( « ) du 22/03 à juin 41
– IV / KG 2 (30 Do 17Z et Do 217)du 13/06/41 à janvier 42
– III / NJG 4 de septembre 42 au 31/07/44 (St. 7 et 8 sur env. 16/18 Bf 110D/E/F/G, St. 9 sur env. 8 Bf 110 puis 5 Do 217N, et 2 Ju 88c uniquement fin 43) (accidents de Bf 110 les 3 et 21/12/42, 21/04/43, Do 217 les 24/02 et 13/07/44)
– LuftBeobachtung St.4 du 05/05 au 24/06/44 (Ju 88 ou Fw 190A ?)
– I / KG 54 (Ju 88) du 06/06 au 25/07/44
– Mi-juillet à fin août 44 : 2 Ar 234 du 1/VOL pour des missions de reconnaissance à haute altitude au dessus de la zone du débarquement allié(Un abri bétonné et voûté de grande taille sera affecté à la mise en œuvre de ces appareils)
– II / JG 11 (Bf 109G) du 16 au 17/08/44
– 9 Me 262A du St.3 / I / KG 51 en repli du 22 au 28 / 08 / 44 depuisChâteaudun via Creil vers Chièvres

A la Libération, le Terrain reçoit l’appellation A-68 par les Alliés, et les unités suivantes y stationnent :

439ème TCG (C 47) du 08 au 28/09/44
404ème FG (P 47) du 13/09 au 01/10/44
365ème FG ( « ) du 15/09 au 04/10/44
36ème Fg ( « ) du 1er au 23/10/44
367ème FG (P 38) du 28/10/44 au 01/02/45
368ème FG (P 47) du 27/12/44 au 15/01/45
410ème BG (A 26) du14/02 à mai 45

Sources :
– Livre « Ils étaient là » (Paul Martin)
– Dossiers SHD / Air séries 2B et D
– Die Verbande der Deutschen Truppen (Tessin)
– Fliegerhorstkommandanturen undFlugplätze der deutschen Luftwaffe 1935-1945 (Mattiello)
– Livre « La Luftwaffe face au Débarquement allié » (JB Frappé)
– WAATS
– Site « ww2.dk/ »
(Jacques Calcine, 2A)

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Reportage suite aux visites effectuées par les membres de l’Association :

Situé au bord de la N44 entre Laon et Reims au Sud de la commune de Juvincourt-et-Damary, il

s’agissait d’un important Flugplätz de la Luftwaffe après avoir été une plateforme d’opération pour l’Armée de l’Air avant guerre. Présence également durant la période 1938-1939 de trois terrains de desserrement sur les communes d’Amifontaine , de Guignicourt et Proviseux (voir les pages correspondantes en cliquant sur les liens).

Dans les mois qui précédèrent l’arrivée des troupes Allemandes, un groupe de Fairey Battle du 76th Wing de la RAF y sera même stationné.

Cette région est riche en souvenir de la première guerre mondiale avec la présence de la ligne de front à proximité et du mémorable  »chemin des dames ». Les alentours du terrain portent encore la marque de ces combats, la nature ne reprenant que peu à peu ses droits sans effacer toutes les cicatrices.

Premier vestige facilement repérable, cette tour de contrôle ou d’observation en bordure de la RN44. A proximité, un loueur ou dépositaire de caravanes et mobil homes utilise encore des anciens bâtiments de la base aérienne Allemande.

Le  »champ d’aviation » aménagé en 1939-1940 par l’Armée de l’Air se trouvait juste en face de la tour d’observation sur une surface d’environ 120 hectares. Lors de la récupération du terrain par laLuftwaffe trois pistes d’envol furent bétonnées : n°1 NNW / SSE (1610m x 65m), n° 2 E / W (1600m x 65m ) et n°3 NE / SW ( 1980m x 60m ). Des  »Rollstrasse » permettaient d’atteindre plusieurs alvéoles abris construits autour du terrain.

Une seule de ces trois pistes est encore assez bien conservé car elle est utilisé par un équipementier automobile. Les deux autres servent de dépôt pour des entreprises de construction ou ont été partiellement enlevés par les propriétaires pour remise en culture des terres.

Afin de présenter les résultats de nos recherches sur place, nous avons divisé notre étude en trois secteurs, un pour chacune des pistes d’envol. Le lecteur pourra ainsi plus facilement s’orienter mais nous tenons à préciser que de nombreuses ruines sont situées à l’intérieur de propriétés privés. Vous ne pouvez donc retourner sur les mêmes lieux sans demander les autorisations aux propriétaires.

Pour suivre notre visite, veuillez vous référer à notre nomenclature

 

 Secteur n°1 en bordure de la RN44

Nous avons déjà présenté ci-dessus la tour de contrôle en ( A ) sur la carte.

Vue aérienne de l’une des trois pistes d’envol, repère ( B )

Cette curieuse construction, très facilement repérable lors d’un survol du site, était l’aire de réglage des compas de vol pour les appareils. C’est une dalle circulaire avec en son centre un anneau de réglage portant indication et graduation des points cardinaux. Un Rollstrasse (taxiway) permet d’amener les avions sur ce lieu. Repère ( C )

   

 

Au bord de la RN44, plusieurs abris sont encore visibles comme prés du cimetière britannique, datant de la première guerre mondiale. Il s’agissait à cet emplacement d’un relais électrique semi enterré. A l’arrière, de solides murs en béton devaient certainement protéger des générateurs de secours (hypothèse non vérifié). Repère ( D )

Entrée de l’abri

Emplacement avec murs pare éclats

Le bois longeant la RN44, nommé  »bois des Boches », face aux anciennes pistes, renferme plusieurs constructions diverses comme des vestiges de hangars, des casernements, un possible centre de commandement semi enterré et certainement d’autres constructions qui nous n’avons peut être pas découverts lors de notre visite. Repère ( E )

Plots support d’une charpente métallique pour un hangar en arc de cercle, dimensions de 35m de long sur 15 de large (approximatif). La RN44 est visible au second plan. Il s’agissait certainement d’un hangar de réparation, un atelier en ruine est d’ailleurs présent sur la façade arrière.

Casernement contenant de nombreuses pièces avec un sous sol. Nous avons retrouvé également à proximité plusieurs puisards et cuves bétonnées pouvant contenir de l’eau ou des réserves de fioul.

Couloir principal, la nature reprend ses droits sur le lieu

Intérieur d’une des chambres, présence de peinture d’origine sur les murs.

Entrée de l’abri souterrain, situé à proximité du casernement.

S’agissait-il d’un simple abri anti-aérien ou du centre de commandement de la base ?

Intérieur, construction en briques sous une épaisse dalle de protection.

Vue aérienne à basse altitude.

Aujourd’hui encore, les constructions sont difficilement discernables sous l’excellent camouflage naturel.

Du bas de la photo vers le haut : restes de Rollstrasse reliant le bois, cimetière britannique,  »bois des Boches », les constructions en blanc sont également des anciens abris. Tout en haut de la photo, on distingue l’ancienne piste n°3 utilisée par l’équipementier automobile. Au centre du bois, emplacement de l’ancienne voie ferrée qui desservait cette zone technique de l’aérodrome.

Présence également au Sud du Bois de plusieurs abris et zone de dispersion pour les avions. Il s’agit encore d’une propriété privée dans l’accès est interdit au visiteurs.

Une voie ferrée ( repère F ) venant du Nord du terrain desservait cette zone de dispersion dans laquelle on retrouve un hangar demi tonneau ( G ) avec voûte béton en assez bon état malgrés un impact de bombe sur le côté.

Réutilisation par le propriétaire

Impact de bombe Emplacement de la porte

De chaque côté du Rollstrasse ( H ), nous pouvons apercevoir plusieurs aires de dispersion et les ruines d’un bâtiment casernement identique à celui décrit plus haut mais en très mauvais état.

aire de dispersion

emplacement de la voie ferrée en F sur la carte

A l’extrémité du Rollstrasse traversant le bois des boches, emplacement de l’ancienne butte de tir

L’étude descriptive sur ce secteur n°1 pourrait se refermer ici mais un fait historique est attaché à cette ancienne base Allemande et mérite d’être relaté :

Le 15 juillet 1944, un sifflement strident est perçu par plusieurs habitants du village de Juvincourt et des environs, provenant du passage d’un avion en approche, un appareil différent de ceux qui évoluent sur la base depuis de nombreux moi. Il s’agit d’un Arado 234, la tout premier biréacteur a être entré en service, opérationnel dans une version d’observation. Son pilote est le Lieutenant Erich Sommer, un  second le suivra quelques jours plus tard piloté par le Lieutenant Horst Götz. Le déploiement de deux avions identiques vient d’être décidé afin d’effectuer des missions photos sur la Normandie, théâtre depuis plusieurs semaines de violents combats.

Image extraite du DVD

 » Erich Sommer, pionnier de l’aviation à réaction sur Arado 234 » –  Philippe Bauduin

Cet appareil n’utilise pas les pistes bétonnées de la base mais se pose parallèlement à la RN44, un peu plus vers le Nord Ouest. Il se pose sur de simples patins avant d’être hissé sur un chariot et amené dans des alvéoles de stationnement construites de chaque côté de la route et recouvert de filets de camouflage. Comme cet appareil est très vulnérable dans sa phase d’atterrissage et de décollage, plusieurs groupes de FW 190 le protége lors de chaque départ ou retour de mission.

La première mission va avoir lieu le 2 août 1944. Ce jour, le lieutenant Erich Sommer va décoller de la RN44 et se diriger vers la Normandie pour d’une altitude de 12 000m ramener des photos de grande qualité qui permettront au commandement de prendre conscience de l’ampleur de la tête de pont allié pour planifier les contre attaques. Le retour s’effectue sans encombre et l’Arado se pose le long de la route sur ses patins. L’appareil regagne ensuite son alvéole de stationnement.

Vue aérienne d’une alvéole avec son Rollstrasse permettant un accès à la route servant de piste d’envol. Cette construction se compose d’un muret de protection, renforcé par une levé de terre, l’ensemble devant être couvert par un filet de camouflage. Possibilité également de disposition d’une toiture de bois (hypothèse non vérifié).

Emplacement pour le débattement de la porte

Réserve dans le mur de béton sans doute pour fixation d’une toiture.

Cinq alvéoles de ce type sont disposées le long de la route, en plus ou moins bon état. Des emplacements abris pour les Arado ou pour du matériel de servitude comme les chariots de décollage ou les engins de levage. Un peu plus vers le Nord, dans le bois sur la  » butte de Noirmont  », on peut distinguer une construction avec un fronton en arc de cercle ( 1 ). Il s’agit du même modèle de hangar que décris précédemment mais sans sa voûte béton détruite ou inachevé. La partie arrière, visible sur notre photo, ne devait être que l’atelier de maintenance abritant compresseurs, générateurs ou tout autre outillage nécessaire à la maintenance d’un appareil.

Sur le côté en ( 2 ) présence d’un autre emplacement avec plots supports, dalle béton et ruines d’atelier l’ensemble étant protégé par un merlonnage de terre. Nous pouvons supposer qu’il s’agissait d’un second emplacement de maintenance mais la construction ne semble pas avoir été achevé.

Hangar avion à comparer avec la photo précédente  

Vue des ateliers latéraux

Vue aérienne de cette construction.

Autres unités de la Luftwaffe présentes également sur le site :

– KG 77 Stab avec I. et II./ Gruppe de mars à juin 1941 sur Ju 88A

– KG 2 avec le IV./ Gruppe du 13 juin 1941 à janvier 1942 sur Dornier Do17Z et Do 217

– KG 54 avec le I./ Gruppe du 6 juin au 27 juillet 1944 sur Ju 88

– KG 51 avec le I./ Gruppe du 27 août au 28 août 1944 sur Me 262

– Einsatzkommando Schenck du 22 au 28 août 1944 sur Me 262

– Luftbeobachtungsstaffel 4 ( escadrille d’observation), formé le 1er mai 1944 est stationné sur la base jusque juin 1944 sur          Bf 110 et Ju 88

– JG 11 avec le II./ Gruppe du 16 au 17 août 1944 sur Bf 109G

– NJG 4 avec le III./ Gruppe de septembre 1942 au mois d’Août 1944 sur Bf 110, Do 217 et Ju 88

Après la libération de la région, la base sera réutilisé par les Alliés sous le nom de code A / 68 pour y déployer des escadrilles US du 7 septembre 1944 au 2 juillet 1945. L’aérodrome sera repris par l’Armée de l’Air en vue d’y aménager un terrain de dispersion aux normes OTAN. Ce projet devait concerner la piste n°2 avec de nouvelles installation, allongement de pistes, marguerites de stationnement, etc …

Le site sera ensuite déclassé pour être rendu aux propriétaires terriens.

 

Secteur n°2         

La piste d’envol et les abords sont aujourd’hui inclus dans le centre d’essai automobile Bosch. L’accés de ce site industriel n’est pas autorisé mais nous avons eu la chance d’obtenir une permission grâce aux démarches réalisées par notre groupe et au Maire de la commune de Juvincourt et Damary.

La visite nous a permis de compléter nos investigations mais il ne nous est pas possible de présenter sur cette page les photos des vestiges encore présents sur le lieu.

Secteur n°3     

Zone comprise prés de la commune de Juvincourt et Damary en bordure de l’une des pistes d’envol. Plusieurs habitations semblent avoir été occupés par les allemands comme l’atteste la présence d’un ancien baraquement et d’un abri comme celui retrouvé dans le secteur 1, repère ( D ).

Extrémité de la piste avec Rollstrasse se dirigeant vers la commune ( A )

 

Casernement en bordure de piste, repère ( B )

Comparez avec celui présent dans le Bois des Boches : même configuration, même agencement. Il semble donc que chaque piste possédait des infrastructures identiques.

Ancien casernement réutilisé par un habitant.

Abri de protection en cas d’attaque aérienne à comparer avec celui du secteur 1 prés du cimetière

En Mai 1945, l’aérodrome de Juvincourt allait être utilisé pour rapatrier en Angleterre des prisonniers de guerre Australiens et Neo Zélandais. Voici deux photos montrant l’embarquement de ces hommes sur le chemin du retour. Ces transferts furent réalisés par des Lancaster des No 463 et 467 Squadron. de la RAAF.

 

Remerciements :

David Bonnaventure, Benoit Coruble, Eric Fardel et Nicolas Dzalba-Lyndis (membres du forum oise 1939-1944)

Jean Philippe Ferand, Jacques Calcine, Nicolas Grebert, Thierry Gehan, Jean Michel Borde et  Jean Luc Van Campenhout      (membres de notre association)

Daniel Gomes, chargé de communication pour la socièté Boch

Denis Brillouet,  Maire de Juvincourt et Damary

Le Royal Patagonian Squadron pour sa mission photographique sur le site

Voir également le site de Philippe Bauduin :  http://www.juvincourt.fr/histoire2.html#aeroport et son livre  » Normandie 44, les photos de l’avion espion  »  pour son aide sympathique dans la  transmission d’informations lors de cette étude.